Ce n’est pas tous les jours que le directeur général du CNRS vous appelle directement sur votre smartphone… François Jérôme a vécu cette situation il y a quelques semaines. La raison ? Ce chercheur poitevin de l’Institut de chimie des milieux et des matériaux de Poitiers (IC2MP) a officiellement remporté la médaille de l’innovation du prestigieux centre de recherche scientifique. A 47 ans, il est devenu l’une des références mondiales de la chimie végétale, à l’origine depuis 2013 d’un congrès international sur le sujet organisé tous les deux ans à La Rochelle. Le prochain se déroulera du 16 au 20 mai 2022.
Ses travaux se fondent sur l’utilisation d’un catalyseur (champs électriques, ondes de choc, ondes ultrasonores) pour transformer des molécules d’origine végétale en matériaux utilisables par les industriels. L’enjeu ? Trouver des alternatives aux produits issus du pétrole. Et l’équipe de François Jérôme va chercher cette matière première de préférence dans des résidus de productions agricoles, forestières ou encore les déchets de scierie et de distillerie, histoire de valoriser tout cela. « Les fabricants de cosmétiques et de détergents sont très friands de molécules biosourcées. Une fois qu’ils ont identifié une propriété spécifique, ils font appel à nos compétences. On cherche alors dans la nature les molécules qui contiennent les bonnes fonctionnalités chimiques, on va les assembler ou les transformer. »
Pour François Jérôme, la recherche en chimie durable est indissociable de l’industrie. C’est pourquoi il a noué des liens avec plusieurs PME et surtout avec Solvay, un des leaders mondiaux de la chimie et des polymères (9Md€ de chiffre d’affaires, 23 000 salariés, dont 3 700 en France). Depuis 2019, l’IC2MP et Solvay mènent des recherches en commun. Dans le même esprit, François Jérôme a été l’un des acteurs majeurs de la création, en 2015, de la fédération Increase, un réseau collaboratif public-privé de l’éco-conception. On y retrouve notamment le Crief à Poitiers, un laboratoire de sciences sociales. « La chimie repose sur des énergies fossiles depuis plus de cent ans. On n’en est qu’au début de la recherche sur la chimie végétale pour obtenir des coûts de production comparable », conclut le scientifique poitevin. Avec l’impact du dérèglement climatique, la feuille de route est tracée, et une chose est sûre, une partie se joue à Poitiers.
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