Depardieu, un formidable Maigret

Le commissaire Maigret enquête sur la mort d’une jeune femme que personne ne semble connaître. Devant la caméra de Patrice Leconte, Gérard Depardieu incarne le héros de Simenon avec une sobriété et une mélancolie très touchantes.

A première vue, elle n’a pas de nom, pas plus que de famille. Le mystère plane autour de cette jeune fille retrouvée décédée pas loin des quais de la Seine, poignardée à plusieurs reprises. Le commissaire Maigret est sur le coup. Alors qu’il interroge les personnes ayant croisé la route de la victime, il fait la rencontre d’une jeune femme lui ressemblant à s’y méprendre. Son enquête prend alors un autre tournant…

Après Monsieur Hire en 1989, Patrice Leconte adapte un autre roman de George Simenon au cinéma, en l’espèce Maigret et la jeune morte. Son film n’en reprend pas le titre pour sobrement s’intituler Maigret, un choix qui n’a absolument rien d’anodin. Ici, l’intérêt du récit n’est pas tant dans l’enquête elle-même, cousue de fil blanc, que dans ce qu’il raconte de l’humanité du commissaire. Alors qu’il se rapproche de la vérité -la méthode est aussi fine que troublante- on comprend que le personnage est meurtri par un deuil irréparable, auquel l’affaire le renvoie constamment. De bout en bout, il apparaît à bout de souffle, las, presque apathique, n’ayant plus goût à rien. Le réalisateur profite là d’une convergence extraordinaire entre les états d’âme de son protagoniste et ceux de son interprète, Gérard Depardieu. L’acteur de 73 ans, qui ne cache plus depuis des années sa lassitude du cinéma, n’est certes plus dans le jeu, mais il incarne corps (fatigué) et âme (errante) cet enquêteur abattu, dont il partage manifestement une profonde mélancolie. Certains y verront peut-être un comédien peu investi voire absent, reste que sa présence impose à ce polar, classique en surface, une sobriété et une sincérité singulières pour le genre.

Policier de Patrice Leconte, avec Gérard Depardieu, Jade Labeste, Mélanie Bernier (1h28)

DR