Comprendre les rémissions 
de la leucémie myéloïde chronique

Des patients atteints d’une leucémie myéloïde chronique (LMC) ayant arrêté leur traitement, quotidien et à vie, n’ont pas rechuté. Pourquoi ? Au CHU de Poitiers, le Dr Emilie Cayssials et son équipe mènent des recherches pour apporter une réponse.

Claire Brugier

Le7.info

Le saviez-vous ? C’est au CHU de Poitiers, au début des années 2000, sous l’égide du Pr François Guilhot, qu’a été administrée la première thérapie ciblée par ITK (inhibiteurs de tyrosine kinases) à des patients atteints d’une leucémie myéloïde chronique (LMC). Vingt ans plus tard, ce cancer de la moelle osseuse est toujours au cœur des recherches du Dr Emilie Cayssials. Le projet de l’hématologue est l’un des trois soutenus financièrement par Sport et Collection « 500 Ferrari contre le cancer ».

« La LMC est due à un seul événement génétique dans la moelle osseuse : une translocation (ndlr, un échange de matériels) entre les chromosomes 
9 et 22, qui crée le chromosome Philadelphie. Pourquoi ? On ne sait pas, mais la moelle osseuse se met à produire beaucoup plus de globules blancs », explique le Dr Cayssials. La thérapie ciblée permet de limiter cette production pour prévenir l’évolution vers une leucémie aigüe, qui engage davantage le pronostic vital du patient. La LMC n’a, elle, pas d’incidence notable sur l’espérance de vie. Mais elle présente une contrainte de taille : un traitement par voie orale à vie, avec ce que cela peut impliquer d’effets secondaires (diarrhées, fatigue, crampes, AVC, problèmes cardiaques, etc.), de difficultés pour emprunter…

En 2007, le groupe français de la LMC, qui regroupe des experts, a testé un arrêt du traitement sur des patients pour lesquels la thérapie ciblée avait rendu la maladie indétectable, soit un tiers d’entre eux. La moitié des patients n’a pas rechuté à long terme, l’autre moitié a été contrainte de reprendre un traitement dans les mois suivants. Autrement dit, chez certains patients le système immunitaire a pris le relais mais pas chez d’autres.

Extension de l’étude

Depuis 2015, à partir d’une cohorte de 30 patients, les recherches du Dr Cayssials et de son équipe, dont les immunologistes Jean-Marc Gombert et André Herbelin, visent précisément à « identifier des cellules anti-LMC », notamment parmi les lymphocytes T innés.

En avril 2021, l’étude a été étendue à douze centres, soit à terme 90 patients (70 inclus à ce jour), et Aurora, un analyseur multiparamétrique, permet désormais d’analyser jusqu’à trente paramètres, contre huit jusqu’alors. « Le prélèvement d’un patient est précieux. Une fois décongelé, il est important d’en tirer un maximum d’informations », note l’hématologue.

Des prélèvements sont prévus à 3, 6, 12 et 24 mois puis tous les ans pendant 5 ans, sur les 90 patients de la cohorte, qu’ils soient en succès ou en échec de rémission, ainsi que sur des patients sains. Les analyses devraient commencer à l’automne. Parallèlement, sur le plan clinique et sous réserve d’avoir des financements, 
« nous avons un projet d’essai sur la meilleure façon de mener le patient vers l’arrêt : en stoppant brutalement le traitement ou de manière décroissante progressive », complète le 
Dr Cayssials. La LMC touche 
10 000 à 12 000 personnes en France, dont 700 nouveaux cas chaque année.

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