La mode n’a pas de prix

Le Regard de la semaine est signé Théophanie Le Dez

Le7.info

Le7.info

A la table d’un café, deux jeunes filles discutent. À côté d’elles, des sacs Zara et H&M. Elles parlent de leurs derniers achats, et de ceux qu’elles envisagent de faire à l’avenir. Sur les réseaux sociaux, d’autres affichent leurs emplettes de la semaine sur Shein ou Bershka. Acheter, jeter, racheter à nouveau pour « être à la mode », se plier aux tendances.

Si l’on en croit Montesquieu, ce n’est pas un phénomène nouveau : dans ses Lettres persanes, il écrivait déjà : 
« Je trouve les caprices de la mode, chez les Français, étonnants. Ils ont oublié comment ils étaient habillés cet été ; ils ignorent encore plus comment ils le seront cet hiver. » 
(Lettre XCIX) Aujourd’hui, on appelle ça la surconsommation, la mode jetable, la 
« fast-fashion ».

Ce n’est pas tant l’idée de changement qui dérange, mais plutôt ce que cela implique. Face à une demande toujours croissante (en quantité, en rapidité et à moindre coût), l’industrie textile a dû renouveler ses méthodes. Par renouveler, on comprend 
« délocaliser » : pour un t-shirt à 4€, il faut une main-d’œuvre sous-payée et exploitée. Législation du travail oblige en France, les pays d’Asie du Sud-Est offrent une plus grande liberté et sont donc privilégiés : au Bangladesh, un employé gagne 
0,32 dollar de l’heure (le plus faible taux horaire du monde selon l’UNECE) pour une journée de douze heures. Parmi ces ouvriers, 80% sont des femmes -victimes de pratiques abusives selon un rapport d’Human Rights Watch- et 50% sont des enfants issus des bidonvilles de Dacca, privés de leur enfance et d’une éducation. Sans protection sociale, ils sont voués à des conditions de travail horribles, dans des usines délabrées. Inutile de rappeler le massacre de l’effondrement de la Rana Plaza (usine textile à Dacca) qui fit plus de mille morts en 2013... Oxfam alerte : les conséquences de la fast-fashion ne sont pas qu’humaines, elles sont aussi environnementales. L’industrie textile rejette 1,2 milliard de tonnes de CO2 par an, est le troisième secteur le plus consommateur d’eau au monde, et nécessite des matières premières polluantes (polyester, teintures).

UNECE : 
Commission économique pour l’Europe des Nations unies.


CV express
Native de Poitiers, je suis aujourd’hui étudiante en lettres-sciences politiques. Ayant fait un stage à la rédaction du 7, je suis plus qu’heureuse d’apporter ma pierre à l’édifice et d’évoluer dans le journalisme. J’espère vous faire voyager avec moi, notamment lors de mon Erasmus au Canada. 

J’aime : le sport sous toutes ses formes, les documentaires de décryptage, la librairie Mollat à Bordeaux, voyager, la géopolitique.

J’aime pas : les opportunistes, faire la cuisine, la pression des examens, les blessures, les climatosceptiques. 

À lire aussi ...