Maxime Guiton. 28 ans. Originaire de Niort. Installé à Poitiers depuis deux ans. Autodidacte. Dessinateur et peintre de talent. Diffuse ses œuvres via les réseaux sociaux. Atteint d’une sévère dyslexie et de la maladie de Crohn. Résilient et persévérant.
Son petit appartement d’un quartier proche du Pont-Neuf est une véritable caverne d’Ali Baba. Pas assez de murs pour
« supporter » toutes les toiles ou les esquisses du maître des lieux. Maxime Guiton a le coup de crayon et de pinceau aussi facile que d’autres ont le verbe haut. Des figurines manga complètent le décor. Le jeune homme a posé ses valises à Poitiers il y a deux ans. « C’était le moment de partir de chez mes parents, confie le Niortais d’origine. En venant ici, je voulais aussi découvrir la ville où ma grand-mère a vécu sous l’Occupation... » A ses côtés, Cédric Bouton écoute attentivement. Il est aussi l’une des raisons de sa présence dans la Vienne. Les deux amis se sont découverts sur les réseaux sociaux, par le dessin, forcément.
« Maxime est doué de ses mains, il mérite de sortir de l’ombre », plaide Cédric. Et pour cause, le fils d’Atsem et d’agent d’entretien a jusque-là davantage connu les galères que la réussite. « En fait, tout est parti du collège... » Dyslexique sévère, l’ado s’accroche lors de ses premières années à Gérard-Philipe. « A l’ancienne », Maxime s’efforce d’écrire et lire sans l’appui d’un ordinateur. Jusqu’en 3e, où les enseignants lui « forcent la main ». Malgré le soutien de ses camarades, il tombe dans une grave dépression dont il ne ressortira que deux ans plus tard. Aujourd’hui, Maxime est reconnu travailleur handicapé. « Mais je ne rentre pas dans une case précise, c’est assez compliqué de trouver une place dans la société. »
Le Deux-Sévrien a connu une expérience professionnelle dans le commerce qui ne s’est « pas très bien passée ». Soupirs... « Mon cerveau ne fonctionne pas au même rythme, et émotionnellement je suis plus vite atteint. »
Des mentors
En dépit des épreuves et des difficultés, Maxime a toujours cru en sa bonne étoile. Sa force de vie, il la puise notamment de... Grégory Lemarchal. Il n’est alors qu’un enfant lorsque le chanteur atteint d’une mucoviscidose remporte la Star Academy, sur TF1. « Si lui arrive à se produire sur scène, je dois pouvoir faire quelque chose moi aussi... Ce fut à la fois un hasard et peut-être aussi le destin. »
« J’ai pris des cours pendant un an avec un professeur, M. Verdier, qui m’a fait
découvrir l’art avec un grand A. »
Contre vents et marées, le minot se force à lire -des ouvrages d’histoire- et écrire, même si « les portes » de ses rêves « se sont refermées » les unes après les autres. Celui qui s'imaginait
« archéologue » ou « historien » a un temps projeté de gagner sa vie en dessinant. « Les métiers classiques me sont inaccessibles »,
enfonce-t-il. D’autant plus que le néo-Poitevin est atteint de la maladie de Crohn, obligé de s’infliger des sessions au CHU de Poitiers toutes les huit semaines, avec « un traitement assez lourd »
à suivre.
Restent le dessin et la peinture, ses primes passions. Celles qui l’ont toujours fait « se sentir libre, sans contraintes, sans règles ». « J’ai pris des cours pendant un an avec un professeur, M. Verdier, qui m’a fait découvrir l’art avec un grand A. » Une sorte de « Léonard de Vinci » affranchi des postures classiques, qui a aiguisé chez son jeune élève le goût de l’observation, de la nature... Pas étonnant dès lors qu’il ait choisi les paysages et plus encore les portraits comme thèmes favoris. « Les portraits racontent beaucoup de choses, l’histoire d’une personne, vraiment. » Une veuve éplorée tenant le visage de son mari tué pendant les guerres de Vendée au XVIIIe siècle (Le cri de la Vendée) témoigne de son univers. Comme un reflet de « l’actualité faite de guerres et de conflits à Gaza, en Ukraine... »
« Un p’tit truc en plus »
Le tableau trône en bonne place dans son salon, à côté du portrait de l’un de ses amis modèle, représenté au milieu de roses multicolores. Fini le noir et blanc exclusif, « symbole de [son] angoisse et de [son] stress ». La couleur a fini par s’imposer dans ses toiles. « Très timide de nature », Maxime Guiton force sa nature pour s’exposer sur les réseaux sociaux (Instagram maximeguiton), sa galerie virtuelle. Les retours y sont prometteurs, les commandes affluent. Il lui arrive de nouer le dialogue avec des internautes. La timidité n’empêche pas la bienséance, encore moins la bienveillance. « Il a un petit truc en plus ! », s’enthousiasme Cédric. En passionné d’histoire de France -« si on oublie notre passé, on n’a pas d’avenir »- et de patrimoine, Maxime apprécie à sa juste valeur la vie à Poitiers. Il lui arrive de se poser dans la rue, carnet de dessin en main et d’immortaliser l’instant. L’anti-modèle de l’intelligence artificielle. « J’essaie de montrer la douceur et l’espoir malgré le chaos. » L’histoire de sa vie.