Le collège Jules-Verne de Buxerolles doit-il passer en REP+, l’échelon maximum de l’éducation prioritaire, pour favoriser la réussite des élèves ? Les enseignants en sont convaincus. Tous les critères sont remplis. Mais quid du risque de stigmatisation ?
« Plus de temps, plus de moyens, plus d’accompagnement. » Pour les enseignants du collège Jules-Verne à Buxerolles, REP+ n’est pas qu’un simple label. C’est pour que leur établissement intègre ce fameux Réseau d’éducation prioritaire renforcé qu’une partie d’entre eux se mobilisent depuis juillet. Jeudi dernier, ils étaient devant le collège pour exprimer leur point de vue : « Ce dispositif permettrait de mieux s’occuper des enfants (555, ndlr) dans leur hétérogénéité, retravailler les notions en petits groupes », souligne Elise Peytoureau, professeure de lettres modernes. « Nous avons aussi besoin de temps de concertation rémunérés pour le suivi des élèves et préparer des projets pédagogiques », poursuit son collègue de latin-grec, Quentin Clairambaud. « Et de plus d’humains tout simplement », relève Mélanie Pinaud, prof de SVT. Sans oublier que les enseignants seraient incités à rester par un système de primes, de quoi favoriser la stabilité des équipes.
Critères remplis
Déjà classé en REP simple depuis 2015, Jules-Verne accueille un public particulièrement vulnérable. Avec l’Indice de position sociale (IPS) le plus faible du département, un taux de boursiers sans comparaison, l’établissement se situe au niveau de George-Sand à Châtellerault qui, lui, est classé REP+. Un constat partagé au rectorat de Poitiers qui renvoie les protagonistes vers le ministère de l’Education nationale, seul maître du jeu en la matière. Mais nuance toutefois : « Sans attendre cette décision ministérielle, des moyens supplémentaires ont été mis à disposition de l’établissement depuis la rentrée 2025, sous forme d'heures supplémentaires, de moyens spécifiques pour des missions de soutien aux élèves, et d’autres pour développer des dispositifs ou options permettant de diversifier et enrichir le parcours des élèves. » On pense ici aux classes à horaires aménagés musique et théâtre.
Si Jules-Verne remplit tous les critères du REP+, reste un problème : la carte de l’éducation prioritaire, qui évolue très peu, va-t-elle être réactualisée bientôt ? En mai 2024, Nicole Belloubet, alors ministre en responsabilité, avait annoncé une révision de cette liste à la rentrée 2025. En vain. En soutien à la cause, la députée EELV de la Vienne, Lisa Belluco, a donc décidé d’interpeller directement son successeur Edouard Geffray à l’Assemblée nationale.
REP+ : Stigmatisation ou revalorisation ?
Passer de REP à REP+ risque-t-il de dissuader une partie des familles d’inscrire leurs enfants à Jules-Verne ? C’est la question que soulève le maire de Buxerolles, Gérald Blanchard. Rencontré jeudi lors de la mobilisation, l’élu s’est dit favorable à ce que « les enseignants disposent des moyens nécessaires pour travailler dans de bonnes conditions ». Mais lui estime que « notre ambition collective devrait être de sortir de l’éducation prioritaire ». Reste à savoir si ces deux souhaits peuvent être compatibles. Ce statut de REP+ peut-il renforcer un sentiment de stigmatisation ? Pour Ludovic Rivière, représentant FCPE des parents à Jules-Verne, le REP+ « permettrait d’apporter un soutien éducatif supplémentaire propice à la réussite des élèves […]. Si ces conditions ne sont pas garanties, c’est toute l’égalité des chances qui vacille ».