Endométriose : « On a appris à 
écouter les femmes »

Le CHU de Poitiers vient d’être labellisé centre pluridisciplinaire de prise en charge de l’endométriose, à l’instar de quinze autres sites en Nouvelle-Aquitaine où cette maladie gynécologique toucherait une femme sur dix. Entretien avec le Pr Xavier Fritel, chirurgien gynécologue.

Claire Brugier

Le7.info

Que recouvre ce label 
de centre disciplinaire ?

« C’est une reconnaissance de ce qu’on a fait mais aussi que l’endométriose peut être soignée. Au CHU de Poitiers, le centre existe depuis 2015, inspiré par le plan cancer. Ces dernières années la médecine a beaucoup évolué sur la pratique à plusieurs disciplines autour d’une même pathologie, pour individualiser les soins autour des patientes. A travailler seul sur l’endométriose, on a toutes les chances de se retrouver dans une impasse. »


Quelles sont les disciplines concernées par l’endométriose ?


« Il existe deux grandes manifestations de l’endométriose, l’infertilité et la douleur, qui peuvent nécessiter des traitements hormonaux, chirurgicaux, une prise en charge de la douleur chronique, des explorations complémentaires… Donc de travailler avec des chirurgiens, des spécialistes de la reproduction, de la douleur, de l’imagerie… Mais aussi d’intégrer des soins de support (kinésithérapeute, sophrologue, psychologue…). Soigner, ce n’est pas uniquement guérir la maladie, c’est guérir la personne. » 


On parle aujourd’hui encore d’une errance médicale de sept ans en moyenne avant le diagnostic…

« Il subsiste toujours des incertitudes autour de l’endométriose. On parle d’errance parce que le diagnostic est difficile mais je préfère parler d’incertitudes. La douleur se vit, elle ne se voit pas à l’image. Le diagnostic passe donc par une expertise clinique et il est important de la partager avec les jeunes professionnels. L’intérêt d’un centre pluridisciplinaire est aussi dans la formation. La seule certitude que j’ai, c’est qu’on ne comprend pas tout. Mais on a appris à écouter les femmes. »


Comment cela se traduit-il ?

« On a appris qu’il fallait prendre en charge les symptômes, ne pas s’arrêter à une échographie qui ne révèle rien mais aller plus loin. On a aussi appris à parler sensibilisation et douleur chronique, à considérer la douleur comme étant la maladie et à soigner sans connaître sa cause. Les chiffres de la douleur des femmes sont très importants mais on ne peut pas savoir la proportion due à l’endométriose. On peut juste rechercher comment la dépister, mieux faire le diagnostic, améliorer les outils… »


La pratique médicale a-t-elle beaucoup évolué ?

« Je réalise aujourd’hui des chirurgies que je ne savais pas faire il y a dix ou quinze ans… Pendant des années, l’endométriose a été une surprise pré-opératoire. Aujourd’hui, cette pluridisciplinarité nous permet d’être exhaustifs dans le diagnostic. On peut même s’organiser pour opérer à plusieurs, avec un urologue, un chirurgien viscéral ou même un autre gynécologue… L’enjeu est d’enlever la maladie sans endommager le reste et de préserver la fertilité de la patiente. Néanmoins, il n’existe toujours ni médicament ni chirurgie miracle, et malheureusement certaines douleurs résistent aux traitements. »

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