Philippe Mouroux : « René Monory ne doutait de rien »

Philippe Mouroux a été le directeur de cabinet de René Monory au Département pendant près d’un quart de siècle. Alors qu’on célèbre cette semaine le centième anniversaire du père du Futuroscope, son bras droit exhume quelques souvenirs.

Arnault Varanne

Le7.info

Que vous inspire le centenaire de la naissance
de René Monory ?
« La période est favorable aux appréciations positives sur René Monory (sourire), ce qui n’a pas toujours été le cas. Des vingt-cinq années à ses côtés, je garde un souvenir extraordinaire. J’ai eu la chance d’aller tous les matins au boulot en étant content. René Monory n’était pas un apparatchik, il avait des convictions libérales sans excès. Il m’a laissé une liberté totale. Il m’a confié dès le départ le dossier du Futuroscope, je m’en suis occupé jusqu’en 2008. Le projet n’est parti de rien en 1983 ! »

Quelle a été la genèse 
de ce projet improbable 
à l’époque ?
« En 1981, après trois ans au ministère de l’Economie, René Monory s’est retrouvé sans fonction nationale, il n’était plus que président du Conseil général de la Vienne. Il était tellement attaché à ce territoire qu’il a voulu faire quelque chose. La rencontre avec Thierry Breton autour du sujet des nouvelles technologies l’a amené à réfléchir à comment sensibiliser la population à ce qui allait bouleverser le monde. D’où l’idée de créer un observatoire du futur. C’est Albert Ducros (ancien journaliste à Europe 1, ndlr) qui a ensuite soufflé le nom Futuroscope. »

Est-ce qu’il serait fier de ce qu’est devenu le Futuroscope et de ce qu’il va devenir ?
« Il était déjà très fier du Futuroscope au début des années 2000, malgré la petite secousse économique après le rachat de la société d’exploitation par le groupe Amaury. Le développement jusqu’à la fin des années 90 a été fabuleux. A l’époque, on avait frôlé la barre des 
3 millions de visiteurs, avec un niveau de croissance de 30% pendant trois ans. Forcément, ça le rendait heureux. Mais il avait vu juste en disant que le pire risque dans une entreprise, c’est quand ça marche trop bien. Le Futuroscope reste sa grande œuvre, il a permis de préserver l’université et de donner une image dynamique à la Vienne. J’en suis assez flatté moi aussi. »

Comment un ancien mécanicien loudunais a-t-il pu réaliser une carrière politique aussi brillante ?
« C’était une personnalité hors norme, atypique à bien des égards. René Monory était un homme qui ne doutait de rien et avait une curiosité extraordinaire. Pour lui, le rêve était une réalité en devenir. Lorsqu’on a imaginé le premier pavillon du Futuroscope, il savait déjà que ça marcherait et qu’il faudrait dépenser beaucoup d’argent. C’était quelqu’un qui faisait confiance. Tous les élus ont reconnu qu’il était brillant dans l’action, il avait une volonté permanente de réaliser et d’aller vite. Pour le Kinemax, on a visité le studio au Japon en avril et il a immédiatement fixé la date du mois de juillet l’année d’après ! »

Plusieurs événements sont organisés cette semaine, 
y participerez-vous ?
« J’irai voir le film qui lui a été consacré avec grand intérêt. René Monory souffrait sans le dire de son absence de cursus scolaire. Il a toujours eu pour regret de ne pas avoir fait beaucoup d’études. Tous ses collègues politiques avaient fait l’ENA, Sciences Po... Ce qui lui aurait vraiment plu, c’est que son nom soit attaché à un équipement scolaire. Un collège René-Monory l’aurait rendu fier (sa fille Michèle Monory a refusé que le nouveau collège de Vouneuil-sous-Biard porte son nom, ndlr). »

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