Hier
Après avoir fait rouler leurs tracteurs jusqu’à Poitiers la semaine dernière, les agriculteurs de la Vienne maintiennent des barrages routiers sur la RN10 et l’A10. Et pas question de bouger avant d’avoir obtenu des solutions concrètes.
Ils avaient prévenu qu’ils ne lâcheraient rien et, une semaine après les premières actions, ils sont toujours là. Les agriculteurs ont d’abord manifesté puis ils ont installé des barrages routiers partout en France, un mouvement d’une rare ampleur que le Premier ministre a tenté d’éteindre vendredi. Mais le discours de Gabriel Attal n’a pas convaincu et les tracteurs ont commencé à rouler vers Paris dès dimanche. Une demi-douzaine de Jeunes agriculteurs (JA) de la Vienne sont du voyage, tandis que leurs aînés de la FNSEA 86 et de la Coordination rurale (CR) continuent de bloquer respectivement l’autoroute A10 à hauteur de l’échangeur de Poitiers-Sud et la RN10 entre Poitiers et Croutelle.
Dans le département, la FNSEA et les JA ont initié le mouvement mardi 23 janvier en faisant converger près de 145 tracteurs vers Poitiers. Les syndicats avaient annoncé une action symbolique pour « mettre sur la paille l’Etat qui les met sur la paille ». Ils ont tapissé les grilles et le parvis de la préfecture, quelques minutes après que son locataire Jean-Marie Girier est venu les saluer. Deux jours plus tard, le représentant de l’Etat n’étant pas descendu à la rencontre des sympathisants de la Coordination rurale, la préfecture a essuyé des dépôts de fumier, de fruits pourris et de lisier. D’autres opérations coups de poing, comme la création d’une « réserve d’eau » à quelques pas de la permanence de la députée écologiste Lisa Belluco, dans le quartier des Couronneries, ont marqué le début du mouvement accompagné par l’Association des irrigants de la Vienne (Adiv). De son côté, la Confédération paysanne, « en partie d’accord sur le constat », a mené vendredi une opération « Robin des bois » en lien avec la CGT : elle a ouvert pendant quelques minutes les caisses d’une grande surface de Poitiers-Nord afin de permettre aux clients de sortir avec des chariots alimentaires
« gratuits ».
« On veut du concret »
Revenus non rémunérateurs, lourdeurs administratives, multiplication des normes environnementales, concurrence déloyale des importations ou, plus localement, conclusions de l’étude Hmuc (Hydrologie milieux usages climat)… Les doléances sont nombreuses. « Nous n’arrivons plus à vivre de notre métier », déplore François Turpeau, président de la CR 86. « On essaie tout le temps de tirer au plus juste, déplore Angélique, 34 ans, double active qui exploite avec son compagnon une ferme céréalière en bio et conventionnel du côté de Chauvigny. On ne peut pas faire du bio sur l’ensemble de la structure et on ne veut pas se déconvertir non plus, mais actuellement je suis contrainte de vendre au prix du conventionnel. Sans compter une partie administrative énorme qui n’a pas de sens. On est jeunes, on va essayer de tenir deux-trois ans… » L’inquiétude est tout aussi palpable chez Hervé, céréalier à Béthines. « On est d’accord pour s’adapter mais tous les produits qui sont vendus en France ne sont pas soumis aux mêmes contraintes. Avec une hausse des charges, une baisse de la production, on subit un effet ciseau et une baisse de revenus de l’ordre de 50%. Si cela perdure, on devra se séparer de salariés. » Dans ce contexte, le discours de politique générale du Premier ministre va concentrer toute l’attention ce mardi. « On veut du concret », rappelle le président de la FNSEA 86 Sébastien Berger, à trois petites semaines du Salon de l’agriculture, prévu du 24 février au 3 mars, à Paris.
Le préfet lance les consultations
Conformément aux annonces du Premier ministre, qui a demandé aux préfets de département d’identifier au plus vite des mesures de simplification pour réduire la charge administrative qui pèse sur les exploitants, Jean-Marie Girier a annoncé une semaine de consultation du monde agricole. « Jusqu’à la fin de la semaine, une dizaine de rencontres seront organisées, en préfecture et sur le terrain. (…) », exlique la préfecture dans un communiqué. Les audiences seront menées par le préfet et le directeur de la DDT (Direction départementale des territoires). « Ainsi, seront consultés les organismes publics ou parapublics (MSA, Chambre d’agricultures), les organismes de service (banques, assurances), les acteurs de la santé animale (GDS, GTV), les acteurs de l’élevage qui seront réunis mercredi après-midi dans le Montmorillonnais (Adec, Alliance pastorale, marché du Cadran…), les organisations agricoles (Entrepreneurs des territoires, Valeurs Agri Métha, Vienne Agro Bio, Fédération des CUMA…), les organismes de gestion de l’irrigation. (OUGC, Adiv…) et les organisations syndicales. »
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samedi 05 octobre