Jean Prost, retour vers le futur

Successeur du très médiatique Jean- François Papineau à la tête de la Direction départementale de la sécurité publique (DDSP), Jean Prost arrive à Poitiers en terrain connu, puisqu’il fut responsable, de 2008 à 2010, du Service de l’information générale. « Cette connaissance de la ville et de ses policiers va faciliter mon installation », prévient le commissaire. Rencontre…

Nicolas Boursier

Le7.info

Dans quel état d’esprit vous trouvez-vous depuis votre retour à Poitiers ?
« J’aurais mauvaise grâce à taire mon enthousiasme. Je débarque dans une ville que je connais très bien et dans un commissariat que j’ai assidûment fréquenté, entre 2008 et 2010. Mon départ de Poitiers remonte finalement à peu. Je pense donc gagner du temps dans mon acclimatation. Or le temps, dans mon métier, est très précieux. »

En quoi l’est-il ?
« Dans l’exigence que nous avons, nous policiers, à sans cesse nous adapter aux mutations d’une société qui demande de la réactivité et de la transparence. Poitiers a la réputation d’une cité relativement tranquille, mais la délinquance y est malgré tout très présente. J’en veux pour preuve les 33 000 appels reçus au 15, l’an passé, qui ont donné suite à 26 000 dossiers traités et 9 000 interventions. Violences intrafamiliales, atteintes aux biens, troubles sur la voie publique… Notre vigilance est perpétuellement mise à l’épreuve. Elle l’est également dans le domaine des stupéfiants. La position géographique de Poitiers sur l’axe Nord-Sud entre Paris et Bordeaux lui confère notamment un statut de passage obligé pour nombre de trafiquants. Si nous avons fait évoluer nos techniques de surveillance et de protection, les malfrats ont eux aussi changé leurs modes opératoires. Au jeu du chat et de la souris, nous nous devons d’avoir toujours une longueur d’avance. »

En quoi votre action à la direction départementale va t- elle différer de celle menée, pendant cinq ans, par votre prédécesseur ?

« Pardonnez-moi si mes propos vous paraissent « politiquement corrects », mais je ne me sens ni l’envie ni le devoir de révolutionner ce qui, des années durant, a parfaitement fonctionné. J’ai eu la chance de travailler avec Jean-François Papineau et de mesurer l’idée qu’il se faisait de la police et de sa mission de service publique. Nous partageons les mêmes valeurs et avons la même volonté de défendre de front les intérêts collectif et individuel. Le pire ennemi de l’homme est le dogmatisme. Moi, je me considère au contraire comme quelqu’un de pragmatique, rigoureux, mais souple. J’ai un objectif, une ligne directrice à tenir, mais si je peux associer l’humain à ce devoir d’exigence, je ne m’en priverai pas. »

Un audit sur la vidéoprotection

Jean-François Papineau a été marqué, à son arrivée, par le douloureux épisode des émeutes du 10 octobre 2009. Vous étiez alors responsable de l’information générale. Ce souvenir est-il toujours un traumatisme ?
« Le caractère subit et brutal des troubles du 10 octobre 2009 a marqué les consciences. Y compris celles de Jean-François Papineau et d’Alain Claeys. Je pense notamment, les concernant, aux campagnes de dénigrement et aux insultes publiques dont ils ont été alors victimes. Poitiers s’est relevée, mais la plus grande erreur à commettre serait de considérer que la plaie est définitivement refermée. J’ai confiance dans le redéploiement des moyens de prévention mis à notre disposition et dans l’efficience de la réforme en cours des renseignements territoriaux. Je suis persuadé que nous sommes mieux armés aujourd’hui qu’en 2008 et 2009, pour anticiper et prévenir. Mais les mots ne sont que des mots. »

Quelle est votre position sur le développement de la vidéoprotection ?
« Là encore, je m’inscris dans la même ligne que mon prédécesseur. Je suis un fervent partisan de la vidéoprotection, comme outil de repérage de délits et d’identification de leurs auteurs. Je comprends les réticences d’une partie de la population, mais je tiens à dire que ne sont visionnées que les bandes susceptibles d’aider les forces de l’ordre dans l’accomplissement de leur travail. Nous sommes au-delà totalement respectueux de la vie privée de chacun. » Avez-vous déjà évoqué le sujet avec le député-maire ? « Pour tout vous avouer, la Mairie nous a missionnés pour établir un diagnostic des besoins en la matière. Un audit a été lancé qui doit permettre de définir les quartiers et zones de la ville dans lesquelles le regard technologique au soutien de l’action humaine serait jugé… opportun. Nous rendrons nos conclusions, le maire tranchera… »

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