Le challenge du recrutement

Les difficultés de recrutement ne se cantonnent désormais plus aux secteurs économiques traditionnellement en tension. Des entreprises de toutes tailles et activités peinent aujourd’hui à intégrer de nouveaux collaborateurs. Le monde du travail est en train de changer.

Claire Brugier

Le7.info

Quelque 70 postes sont à pourvoir chez Kramp, une quarantaine au Centre de rénovation de véhicules d’occasion (CRVO) d’Emil Frey, 20 chez Body Nature et combien d’autres disséminés ici et là, au sein de PME désireuses d’accompagner leur croissance nouvelle ? Dans la Vienne, 41% des entreprises ayant un projet de recrutement ont moins de 10 salariés. Beaucoup peinent à le concrétiser. Dans les métiers en tension, comme la carrosserie, le bâtiment ou la santé, ces difficultés n’étonnent plus. Mais le phénomène s’étend désormais à des secteurs très divers. 
52,5% des recrutements non saisonniers sont jugés difficiles par les employeurs.

Dans le contexte actuel, la comparaison avec les chiffres du chômage interroge. Dans la Vienne, le nombre de demandeurs d’emplois est en hausse de 3,9% au premier trimestre. D’un côté des entreprises qui recrutent, de l’autre des demandeurs d’emploi plus nombreux, l’équation pourrait paraître simple mais entrent en ligne de compte la méconnaissance ou l’image de certains métiers, l’environnement de travail, l’organisation au sein de l’entreprise…

« Nous sommes en plein développement mais il est difficile d’avoir du personnel qualifié, surtout sur l’aménagement paysager qui requiert des savoir-faire variés, en maçonnerie, en terrassement, en création de massifs… », souligne Barbara Gandrillon, co-gérante de Gandrillon Paysage. Mêmes doléances de la part de Damien Grimal, co-dirigeant de Desjoyaux. « Le secteur de la piscine est porteur. Pourtant nous avons une vraie difficulté à trouver des collaborateurs. » Pour y remédier, le pisciniste a mis en place à Saint-Etienne sa propre formation « tous frais payés ». Malgré cela, les candidats ne se pressent pas au portillon. Le constat est le même à Body Nature, pour du temps partiel. L’entreprise de vente en ligne et à domicile propose actuellement 20 postes de conseillers ou conseillères sur le Nord-Vienne. « On a du mal à recruter en général, mais le confinement a renforcé cette difficulté », confie l’animatrice, Delphine Pierre.

« La qualité de vie au travail est un vrai sujet »

Emil Frey l’a compris. Le distributeur automobile a ouvert les portes de son CRVO en août dernier, à Ingrandes, avec 101 personnes recrutées en externe. « Nous avons aujourd’hui 144 salariés, nous souhaitons monter à 180 assez vite » note Damien Wisniewski, directeur Business Unit pièces de rechange et après-vente. Pour ce faire, Emil Frey utilise le job dating, avec visite de son site et de ses outils novateurs. « Cela permet de faire entrer les candidats dans notre univers et de lever les freins liés à l’image de l’usine. » Autre levier : « un système de cooptation par nos propres salariés, avec prime. » La démarche est payante. Vendredi, lors du dernier job dating, 59 candidats étaient pré-inscrits.

« Chez les jeunes comme les moins jeunes, le rapport au travail a évolué, résume Christophe Ducreau, fondateur de l’agence d’interim Agentis à Poitiers. Parallèlement, aujourd’hui, les entreprises recherchent des compétences mais aussi un état d’esprit. » En perturbant l’économie, la crise sanitaire semble avoir accéléré la mutation du monde du travail. Recrutement, environnement, organisation… L’entreprise est amenée à s’adapter.

(*) Enquête Besoins en main-d’œuvre, Pôle Emploi, mai 2021.

 

Crédit photo : Emil Frey.

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