L’esport fait son entrée 
à l’université

La création du premier diplôme universitaire français de « manager d’équipe esport » renforce la place de Poitiers dans l’écosystème du jeu vidéo. Lequel se structure progressivement pour la compétition et le sport-santé.

Le7.info

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A Poitiers, l’écosystème des compétitions de jeu vidéo se dote d’une brique supplémentaire avec la création d’un diplôme inter-universitaire de « manager d’équipe esport ». L’objectif : former des encadrants à l’aise à la fois dans la performance technique mais aussi… la prévention-santé. En effet, on le sait désormais, les jeux vidéo sont proposés notamment aux seniors afin qu’ils conservent leurs capacités physiques et cognitives le plus longtemps possible. Souvenez-vous de Silver Geek !

Les facultés de Sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps) des universités de Poitiers et Paris portent ce projet de formation en un an. Il s’adresse en priorité à des « managers, coachs, analystes en exercice qui auraient appris le métier en autodidacte, des étudiants de Staps qui voudraient élargir leur champ d’intervention et à des athlètes de haut niveau en reconversion », précise Nicolas Besombes, co-référent pédagogique de ce DU. Pour lui, cette collaboration entre les deux universités est logique car « Poitiers et Paris sont deux lieux névralgiques de l’esport en France où se trouvent de nombreux acteurs importants du secteur ». Et lorsque le vice-président de France Esports le dit, on peut le croire.

Un cerveau
 bien oxygéné

La première promotion entrera en septembre 2022. La formation comportera quatre modules afin d’aborder l’optimisation des performances, le contrôle des émotions mais aussi les risques de troubles musculo-squelettiques et des pratiques compulsives ou encore les dimensions juridiques et économiques du secteur. Un autre volet s’intéressera à la dynamique de groupe, la gestion de crise… « C’est la première formation universitaire publique adossée à de la recherche », se réjouit Arnaud Saurois, maître de conférences en Staps à Poitiers, aussi co-référent pédagogique de ce DU. Côté recherche justement, le laboratoire Move (Mobilité, vieillissement et exercice) est en première ligne. Rattachée à la faculté de Staps, cette équipe s’attache depuis plusieurs années à comprendre le rôle de l’exercice physique sur les interactions cœur-cerveau. Une chose est sûre : garder de façon continue et répétée une position assise limite la capacité de l’organisme à réguler la pression artérielle et donc l’oxygénation du cerveau. « L’enjeu pour les gamers est de rester concentrés sur de longues périodes et surtout de prendre des décisions de façon très rapide, explique Laurent Bosquet, directeur de Move. Et ça, on sait que c’est une capacité qui est très sensible à la disponibilité en oxygène. » Reste donc à trouver de nouveaux moyens d’optimiser leurs performances.

Et le Creps dans tout cela ? Souvenez-vous, en 2019, le premier centre d’entraînement public esport ouvrait ses portes dans cette structure omnisport basée à Vouneuil-sous-Biard. Ce dispositif « n’a pas trouvé son public », reconnaît Patrice Béhague, désormais ex-directeur du Creps de Poitiers. Seule la GameWard Team a bénéficié de cette offre et c’était à l’occasion de… son inauguration, en avril 2019. Bien sûr, la Covid n’a pas aidé. Les équipements du Creps pourraient servir aux étudiants du DU pour des mises en situation. Si rien d’officiel n’est signé, le contact est noué.

Association
Les orKs, « comme un club sportif »

A la rentrée universitaire 2020, les orKs Grand Poitiers ouvraient leur tout premier club esport, en partenariat avec le Suaps et le Crous de Poitiers. Le principe : initier et entraîner des étudiants au jeu vidéo compétitif « comme on le ferait dans la section Loisirs d’une association sportive », indique Pierre Mc Mahon, leur président. Trois créneaux par semaine sont aujourd’hui dédiés à cette pratique, au sein de la résidence Descartes. C’est dans cette même logique que les orKs viennent de lancer un nouveau club esport, destiné aux 7-17 ans, à la médiathèque François-Mitterrand. Avec une adhésion annuelle (110€), comme tout club de sport. « Ces créneaux ont plusieurs finalités. D’abord transmettre une bonne technicité du jeu, développer chez les jeunes une pratique saine et anticiper les dérives, puis soutenir les parents dans le rapport de l’enfant à l’écran. On n’est pas là pour juger mais pour sensibiliser. » Un club esport a également vu le jour à Parthenay, il pourrait s’en créer un autre à Chauvigny. A terme, ces clubs pourraient s’affronter au sein d’une Ligue. Par ailleurs, les orKs réfléchissent à une « version 2 » de « Team Job », tremplin à l’insertion professionnelle testé au premier semestre avec la Mission locale d’insertion du Poitou (lire le n°511). Ils ont aussi fourni jeux et consoles à l’atelier Emploi & Esport proposé la semaine dernière à Poitiers, dans le cadre de la semaine pour l’emploi. Enfin, et avec le soutien de Grand Poitiers et de la Région, l’association espère pouvoir bientôt disposer d’un local -« on a plusieurs pistes »- qui ferait office de Maison du jeu, de l’esport et du numérique. « Une sorte de carrefour des pratiques ludiques », présente Pierre Mc Mahon.
Steve Henot et Romain Mudrak

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