Ah, mes amis, quel choc !
J’en suis encore tout chamboulé. J’ai appris de la bouche de l’édile palois, Premier ministre de passage, que j’étais un « boomer », né dans une période dorée, durant les Trente Glorieuses. Que sans le savoir, j’avais tiré le gros lot ! C’était un lendemain de guerre. Pendant cinq longues années, nos parents en avaient connu les affres, la peur d’être écrasés sous les bombes, la disette, la destruction de leurs biens. Et puis, un jour, l’heure de la libération a sonné ! Alors, dès qu’ils l’ont pu, ils ont voulu tourner la page, vivre enfin… Pleins d’entrain et d’ardeurs, ils ont fait parler la tête, les bras et les draps. Ils ont travaillé sans compter à la reconstruction de la France et à son repeuplement. Ah, les braves gens, ils ne pensaient pas à mal, ils voulaient juste croire en un avenir plus radieux, avec beaucoup d’enfants autour d’eux ! Ils s’adonnaient d’autant plus à la tâche que même en haut lieu, on voyait tout en grand, un pays de DS sur les routes, survolé de concordes et sillonné de TGV.
A 20 ans, le boomer que je suis, connut trois crises pétrolières qui mettront à bas des pans entiers d’industries et engendreront des cohortes de chômeurs. Les dés étaient jetés pour une nouvelle ère et nous ne le savions pas ! Le Chinois matois et travailleur nous inonda de biens « bon marché » et l’Américain, créatif, nous proposa un monde d’écrans addictifs. Le chant des sirènes fut si convaincant que la conquête fut courte. Et bientôt, nous nous retrouvâmes sous dépendance.
Sous le charme de ce programme attractif d’une vie indolente, nous nous sommes lancés dans l’invention du modèle social français, dans la gestion du temps libre, du toujours plus. Petit à petit, le pays s’est résigné. Il a perdu beaucoup d’entreprises et d’emplois, le chômage est devenu structurel, le déficit abyssal. Un tonneau des Danaïdes dans lequel Bercy, créatif à l’envi, déverse toujours plus d’impôts. Champion du monde en la matière, notre grand argentier file en Suisse pour prôner la recette miracle du « en même temps fiscal », une levée massive de taxes tout en creusant un déficit de 6%.
En attendant une charge salvatrice du FMI pour nous imposer la cure d’austérité nécessaire, le « boomer » devient un coupable idéal, le profiteur, le seul encore possible à pressurer. Mais que personne ne s’y trompe !
C’est un papy et donc à lui seul, il ne peut se révéler une solution d’avenir ! Faire croire le contraire serait une forfaiture, une de plus.
CV express
Dirigeant d’entreprise durant trente ans, j’ai créé, géré et développé la première société française de conseil en agriculture et en environnement. Retiré depuis 2019 des affaires, j’occupe mon temps libre entre le jardinage, la peinture et l'écriture. J’ai écrit quatre livres dont trois romans (Les Blondel, L’Esquinté, Le froc et la brique), et un recueil de chroniques, « Ah, mon Georges ! ».
J’aime : passer du temps dans mon jardin, écouter les histoires des gens, dévorer des oursons à la guimauve, faire la cuisine, déguster un bon vin, écrire et peindre.
J’aime pas : les conflits stériles, les endives cuites, la foule, l’orage.