Entre 2023 et 2025, les rivières de la Vienne ont fait l’objet d’un important travail d’inventaire. Un effort nécessaire dans un contexte où les enjeux de biodiversité, de qualité de l’eau et d’adaptation aux sécheresses redessinent le visage des cours d’eau.
Bottes hautes, tenues imperméables et calepin à la main, les botanistes ne se limitent pas seulement aux plantes terrestres. Entre 2023 et 2025, Nathan Lavaux, de Vienne Nature, s’est en effet intéressé aux espèces aquatiques pour dresser un état des lieux de la flore des rivières du département. Initiée par Poitou-Charentes Nature, cette étude vient combler un manque. « Il existe d’anciennes données mais elles n’étaient pas rattachées à un protocole spécifique que l’on pourrait réutiliser par la suite », indique le botaniste. Dans la Vienne, 84 tronçons de 50 mètres ont ainsi été étudiés. Le but ? Mieux connaître la répartition des hydrophytes -les plantes aquatiques-, souvent méconnues, alors qu’elles constituent d’excellents indicateurs de l’état écologique.
Parmi les espèces recensées, le myriophylle, le potamot noueux ou encore le nénuphar jaune sont observables à Saint-Benoît, dans le Clain. Leur présence confirme le potentiel écologique du réseau hydrographique local, mais aussi sa fragilité. « A cet endroit, il n’y a que trois espèces végétales différentes. On ne peut pas parler d’une diversité exceptionnelle. Parfois nous nous rendions sur des tronçons afin de les étudier, mais une fois sur place il n’y avait rien à recenser »,
déplore Nathan Lavaux.
Un constat alarmant
Résultat, « les cours d’eau sont dans un état écologique préoccupant ». Peu d’herbiers denses, une quantité élevée de nutriments par endroits, des berges trop abruptes… mais pas seulement. « Des espèces patrimoniales mentionnées historiquement n’ont pas été retrouvées dans la moitié des stations prospectées. Cela nous alerte. » Les causes sont multiples. « Beaucoup de ces perturbations sont causées par l’Homme. L’eau peut être polluée par des engrais ou des pesticides par exemple et certaines espèces ne peuvent pas survivre lorsqu’il y a trop de nutriments. »
Les étiages sévères et les épisodes d’assèchement mettent aussi la flore en danger. Le bilan 2023-2025 montre également une progression des espèces exotiques envahissantes comme l’élodée, à Chasseneuil-du-Poitou, ou encore la jussie. Leur développement rapide, favorisé par les eaux lentes et enrichies en nutriments, étouffe les peuplements indigènes et modifie l’oxygénation des milieux.
Des mesures peuvent être mises en place face à ces dégradations, comme la lutte contre les plantes exotiques, la restauration des berges et cours d’eau et la mise en place de zones tampons entre les rivières et les exploitations agricoles
« pour limiter les nutriments ».
Cet état des lieux sera renouvelé « dans dix à vingt ans » pour mesurer les évolutions des écosystèmes soumis à un changement climatique déjà visible.