A la chasse aux passoires thermiques

Adoptée en juillet 2021, la loi Climat et résilience prévoit à terme d’interdire de louer des passoires thermiques. Les diagnostiqueurs immobiliers sont en première ligne. Entretien avec Rémi Bourreau, diagnostiqueur 
à Audibien.

Steve Henot

Le7.info

En quoi consiste votre métier de diagnostiqueur immobilier ?
« On réalise tous les types de diagnostics : amiante, électricité, performance énergétique (DPE)... Il faut voir le diagnostic comme le contrôle technique d’une voiture, mais pour une maison. Ce sont des indicateurs qui vont surtout intéresser un acheteur, pour savoir à quel type de bien il a affaire. » 


Comment a évolué le DPE, diagnostic le plus connu ?
« Il a changé le 1er juillet 2021. Avant, on l’établissait sur une moyenne des trois dernières factures de consommation. Aujourd’hui, nous collectons toutes les informations physiques d’un logement : sa surface, son mode de chauffage, sa ventilation, l’orientation des fenêtres, etc. Ces données vont alors alimenter le nouveau moteur de calcul créé par le gouvernement. Le rapport aboutit à une note (de A à G) et une estimation de la consommation énergétique, en euros. Le DPE est valide dix ans, il permet à un acquéreur de comparer facilement deux biens. Il a été pensé pour lutter contre les passoires thermiques, à savoir les logements classés F ou G. On estime qu’il y en a 6 millions en France, beaucoup de bâtisses construites avant le choc pétrolier de 1973. Cela concerne aussi pas mal de bâtiments haussmanniens à Paris. Mais au prix du m2, beaucoup de propriétaires rechignent encore à les isoler. »


L’audit énergétique sera obligatoire pour les passoires thermiques dès le 1er avril 2023. Quelle différence avec le DPE ?
« L’audit consistera à dire quels travaux il faut engager sur ces biens. C’est un peu redondant avec le DPE dans les contrôles, à ceci près que l’on va nous demander d’être plus précis sur le coût des travaux recommandés. Ce sera beaucoup plus chronophage, il y aura besoin de plus de main-d’œuvre. Aujourd’hui, estimer un montant précis paraît compliqué vu que les prix changent tout le temps… Et il y a un effet pervers que le gouvernement n’a pas anticipé :
bon nombre de propriétaires de passoires thermiques ont depuis vendu leurs biens et ceux qui les ont achetés n’ont plus les moyens de financer les travaux car il s’agit souvent de primo-accédants. »


Il existe des aides au diagnostic, à l’audit et aux travaux (le dispositif MaPrimeRénov’ notamment). Sont-elles suffisantes ?
« Loin de là. Avec des revenus très faibles, on peut couvrir jusqu’à 70% des frais mais les 30% restants ne sont pas accessibles pour autant. Il y a aussi des aides pour les copropriétaires, mais tout le monde doit se mettre d’accord, payer… Il faudrait une politique plus volontariste et pas des lois faites au doigt mouillé, sans consulter la profession. »

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