La tyrannie des parents

Comme l'équipe de France de football, l'école intéresse tout le monde. Mais quand les parents veulent prendre la place des enseignants, un nouveau dialogue doit s'instaurer.

Romain Mudrak

Le7.info

Damien vient d'être collé. Le motif ? «Non respect de la discipline en étude». Scolarisé dans un collège de la Vienne, il revient à la maison, l'air abattu... Ni une, ni deux, sa mère, ulcérée, prend sa plus belle plume pour envoyer à son tour un « avertissement » à l'enseignante irresponsable et son principal. Reprenant la version de son petit ange, à qui on donnerait le bon Dieux sans confession, elle écrit : « Damien s'est déplacé de sa table au bureau pour prendre une feuille de sudoku dans le but de s'occuper jusqu'à la fin de l'heure d'étude. Il semble, donc, que cela n'a pas plu à sa professeur qui, soit dit en passant, semble avoir très régulièrement ses humeurs. Damien n'a, ce jour-là, aucunement perturbé l'étude ni manqué de respect à cette dame. Je considère donc ce motif comme non recevable. »

Droit opposable à la réussite

Que les enfants retournent les situations à leur avantage, ce n'est pas nouveau. Mais que les parents les croient et réagissent aussi vigoureusement, on n'avait jamais vu ça. Selon les syndicats d'enseignants, le phénonème tend à s'accroître, de manière pernicieuse, sans violence : « A l'image de la loi sur le logement, un droit opposable à la réussite scolaire se développe chez les usagers de l'école, estime Laurent Cardona, représentant l'Unsa. Si l'enfant échoue, c'est que les profs font mal leur travail. » Toufik Kayal, du Snalc, parle d'«attitude consumériste» de certaines familles.

Le dialogue doit s'ouvrir


« Les parents ont compris que l'école était importante pour l'avenir de leurs enfants, ils s'imiscent dans son fonctionnement parce qu'ils sont inquiets », répond Isabelle Siroy, porte parole de la FCPE, qui admet toutefois « la maladresse » de certains d'entre eux. Les parents ne se content plus de répéter les leçons le soir. Ils conseillent les profs sur les auteurs à étudier et les notions de maths à approfondir. Et «c'est normal», assure Patrick Trouvé, chargé au Rectorat de maintenir de bonnes relations entre membres de la communauté éducative au sein des établissements. « Face à la démission de certains parents, on a voulu introduire le concept de coéducation dans le système scolaire, les enseignants sont donc redevables d'explications. Un dialogue entre partenaires doit s'instaurer. »

Une circulaire précisant le rôle des parents à l'école a été publiée une première fois au Bulletin officiel dès 1985, puis modifiée le 25 août 2006. Pourtant, les réactions des adultes face au comportement des adolescents manquent toujours de cohérence. « Le dialogue est en cours de normalisation », constate la FCPE. C'est essentiel pour ne pas créer une génération « d'enfants roi » au-dessus des lois et du règlement intérieur.

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