La fin du brevet professionnel obligatoire pour s’installer et l’arrivée de nouveaux concurrents font vaciller les équilibres dans le domaine de la coiffure. Dans la Vienne, les professionnels tirent la sonnette d’alarme.
Ils ont troqué leurs ciseaux contre des pancartes aux slogans sans équivoque. À Paris, fin juin, les coiffeurs ont manifesté massivement. Sur les banderoles brandies dans la capitale, un message est revenu en boucle : « Non à la concurrence déloyale ». Un cri d’alerte lancé par une profession ébranlée depuis qu’une réforme est venue bouleverser les règles d’accès au métier. Depuis 1955, l’ouverture d’un salon de coiffure nécessitait obligatoirement la détention d’un brevet professionnel ou d’un brevet de maîtrise. Mais depuis le 1er juillet 2023, sous l’impulsion d’une directive européenne visant à faciliter l’accès à certaines professions, cette obligation a été levée. Il est désormais possible de s’installer comme coiffeur en justifiant de trois ans d’expérience professionnelle, sans diplôme spécifique. « On a du mal à accepter que la reconnaissance de la formation disparaisse, déplore Eric Bouniot, président de l’Unec Vienne (Union nationale des entreprises de coiffure). Un CAP, c’est une base technique. Mais seul le brevet de maîtrise forme à la gestion. On ne veut pas diviser la profession, mais rappeler qu’un salon, c’est une entreprise et pour gérer une entreprise, il faut être formé. »
Barbers et micro-entrepreneurs
La colère gronde aussi face à la prolifération d’enseignes de barbiers, un secteur en plein essor.
« Il y a d’excellents barbiers. Mais certains établissements, selon les autorités, servent à d'autres activités que la coiffure et sont soupçonnés de blanchiment d'argent. Avec des trésoreries illimitées, ils peuvent casser les prix. » En cinq ans, plus de trente entreprises en infraction ont été signalées au procureur de la République de Poitiers, avec huit fermetures et douze mises en conformité exigées. Autre phénomène qui déstabilise la profession : la montée en puissance des micro-entreprises (environ 10% des installés dans la Vienne). Plus souple que le statut classique, ce régime fiscal permet d’échapper à la TVA et de bénéficier de charges réduites. Pensé à l’origine comme un tremplin vers l’installation, il est désormais utilisé comme un statut pérenne, entrant directement en concurrence avec les salons traditionnels. Face à ces bouleversements, le secteur souffre :
huit entreprises de coiffure sont actuellement placées en procédure collective dans le département et dix-neuf cherchent un repreneur. Pour réagir, la profession prépare la mise en place d’un label qualité. Objectif :
valoriser les salons respectant les critères de qualification et la qualité des services auprès des clients.