L’ancien Premier ministre François Bayrou avait eu des mots durs contre les retraités nés après la Seconde Guerre mondiale, accusés de ne pas prendre leur part dans la résorption du déficit. Sa diatribe n’est pas passée.
Il a eu beau s’en défendre, François Bayrou a braqué une partie non négligeable de la population bien avant d’être « renversé » par une majorité de députés le 8 septembre lors du vote de confiance. Il a suffi d’une déclaration au journal télévisé de TF1, le 27 août, sur « une génération qui vit dans le confort » pour mettre le feu aux poudres. L’éphémère Premier ministre avait enfoncé le clou dans des termes peu amènes :
« Les premières victimes, ce sont les plus jeunes des Français. C’est eux qui devront payer la dette pendant toute leur vie […]. Tout ça pour le confort des boomers comme on dit qui, de ce point de vue-là, considèrent que ma foi, tout va très bien. »
« J’ai perçu sa déclaration comme une insulte, une honte, même une blessure, fulmine encore Danielle Leberre. Moi, j’ai 79 ans, j’ai travaillé jusqu’à
65 ans et je ne pense pas avoir ma volé ma retraite. » L’énergique présidente de Génération Mouvement 86 se fait la porte-parole de « tous les petits retraités à la campagne qui touchent pour certains 700 à 800€ de pension ».
Et aussi des autres, mieux lotis certes, mais qui « aident leurs enfants et leurs petits-enfants ».
« Je peux vous dire que les adhérents (4 200, ndlr) ne sont pas contents, même si ce n’est pas forcément eux qui vont aller taper du pied dans la rue. »
« Il y a des vieux riches »
Sociologue du grand âge, Michel Billé a lui aussi été « un peu en colère » en entendant l’ex-locataire de Matignon.
« C’est tellement facile et injuste... En 2019, une députée néo-zélandaise avait dit à son collègue au Parlement « Ok boomer » (en 2019, ndlr). En France, on peut le traduire par ta gueule vieux con », résume-t-il. Selon lui, les enfants nés après-guerre et jusque dans les années 60
ne sont pas des privilégiés.
« Nous sommes une génération qui a dû beaucoup travailler et fait évoluer les conditions de travail. C’est parce qu’on a payé des impôts qu’on a pu construire des lycées, des hôpitaux dans les années 70-80 », abonde le retraité de 78 ans.
S’il reconnaît qu’« il y a des vieux riches », Michel Billé s’empresse de préciser : « Ils ne sont pas majoritaires ! » Et de citer l'association Les Petits frères des pauvres selon laquelle « une femme retraitée sur deux vivant seule est en-dessous du seuil de pauvreté ».
En France, le nombre de vieux pauvres est estimé à deux millions, soit 2,9% de la population. Combien étaient-ils dans la rue les 10 et 18 septembre ? Difficile à estimer. « Mais je peux vous dire que beaucoup se sont sentis offensés de se faire traiter de boomers, jure Philippe Jalladeau, des retraités de la CGT. Surtout quand on voit le débat sur la taxe Zucman et le rapport du Sénat sur les 210Md€ dont bénéficient les entreprises... »