Les sportifs poitevins affectés par le Covid-19

En France ou à l'étranger, les sportifs poitevins voient eux aussi leur quotidien perturbé par le Covid-19 et par les mesures prises pour lutter contre la propagation du virus. Ils partagent leurs doutes, leurs espoirs et leur sentiment sur cette drôle de période, inédite à plus d'un titre.

Steve Henot

Le7.info

Stephen Delcourt, manager de la FDJ Nouvelle Aquitaine Futuroscope, équipe féminine internationale de cyclisme basée dans la Vienne.
« Début mars, les Italiens ont forcé pour faire la Strade Bianche (deuxième manche du Women's World Tour, ndlr). Notre staff avait fait la route jusqu'à Sienne, la moitié de l'équipe avait déjà pris l'avion. La décision a finalement été prise d'annuler la course deux jours avant le départ. Puis nous avons eu le même cas en Hollande, où la Ronde Vand Drenthe a été annulée trois jours avant. Là encore, notre staff était déjà sur place. Très vite, on a décidé de mettre l'équipe en suspens. Cette situation va durer longtemps, c'est pourquoi j'ai demandé aux filles de ne plus s'entraîner. Si elles ont eu peur ? Elles étaient assez naïves, dans une niche, dans leur bulle sportive. Naturellement, elles pensent aux JO. Et puis, nous avions de bons résultats en ce début de saison, un cercle vertueux s'installait dans l'équipe... Chacune est rentrée chez elle, comme pendant une trêve hivernale. Elles commencent à prendre conscience d'une crise sanitaire mondiale. Le Danemark (Cecilie Uttrup Ludwig), la Norvège (Stine Borgli) et la Suède (Emilia Fahlin) sont aussi touchés, mais pas encore au point du confinement. Nos deux Australiennes (Brodie Chapman et Lauren Kitchen), par exemple, se sont mises en quarantaine d'elles-mêmes. Tous les sportifs n'ont pas encore cette conscience-là, il faut être exemplaire dans cette situation.

Jusqu'au 31 mars, elles n'ont aucun programme à suivre. On part du principe que nous devons rester confinés jusqu'au 15 avril et que l'on ne reprendra pas la course avant juin. Les trois prochaines manches du World Tour étaient nos objectifs, elles ont toutes été annulées. On s'attend à avoir une saison ultra raccourcie, plus resserrée si certaines épreuves sont reportées. La concurrence sera plus rude, tout le monde voudra se donner à fond. En espérant que le virus soit loin de nous à ce moment-là.
Nous avions pris des réservations d'avions et d'hôtels jusqu'à début avril. Beaucoup refusent aujourd'hui de nous rembourser les frais, ce qui nous vaut environ 22 000€ de pertes. Nos sponsors vont aussi être fragilisés, leur engagement pourrait se réduire dès la saison prochaine selon l'impact de la situation sur leur activité. Et on sait bien que le sport, dans ces moments-là, n'est pas une priorité. Nous sommes devenus propriétaires de notre terrain vendredi 13 mars, le chantier (du futur siège de l'équipe à Jaunay-Marigny, ndlr) devait démarrer lundi... Évidemment, il va prendre du retard. Économiquement, on n'est pas épargné. Mais il est encore trop tôt pour calculer quoi que ce soit. Je n'arrive pas à me projeter. »

Earivn Ngapeth, volleyeur star du Zenit Kazan (Russie), positif au Covid-19.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

A post shared by Earvin Ngapeth (@earvinngapeth) on Mar 19, 2020 at 12:44pm PDT


Lou Brouleau, tenniswoman poitevine (366e mondiale WTA) installée à Madrid.
« Ma saison s’est arrêtée en cours de tournoi la semaine dernière, en Tunisie. J’étais en quart de finale, et l'International Tennis Federation a pris la décision d’annuler la compétition et de repousser la date de reprise au 26 avril (minimum, je pense). Pour être honnête, je commençais personnellement à vouloir rentrer avant que les frontières ne se ferment. C’est un peu dur d’être confiné pour un sportif qui bouge toute la journée, mais je suis très contente d’être à la maison et de faire des choses que je n’ai ni le temps ni l’habitude de faire. On lit, on se repose en regardant des séries, on fait des jeux de société, la cuisine, on fait avec ce qu’il y a mais surtout on prie pour les personnes malades. C’est un repos forcé mais je suis tellement peu à la maison en général, que je ne vais pas me plaindre. C’est une opportunité pour découvrir de nouvelles choses.

On a la chance d’avoir accès au toit (je vis en appartement) et tous les jours j'y fais une heure de physique, des exercices que mon préparateur m’envoie ou via des applications. C'est ce qui me permet de garder un minimum de forme. La situation est assez tendue en Espagne et les mesures sont assez strictes. Les sorties sont possibles mais une personne à la fois, les animaux de compagnie doivent faire leurs besoins et remonter. Pour l'anecdote, je me suis fait arrêter avec la chienne, dimanche. On m'a dit de faire demi-tour et de ne pas traîner. A l'entrée des supermarchés, des gants sont mis à disposition pour faire ses courses et des distances de sécurité sont à respecter. Madrid a toujours été une ville tranquille mais aussi très surveillée.Tout le monde est inquiet pour les personnes malades et ce qu’il reste à venir, nous sommes tous étonnés de la situation mais c’est ainsi. On se fixe des objectifs dans nos journées et on vit au moment présent.

Concernant les tournois, je dois dire que je n’y pense pas tellement, les clubs ici sont fermés comme de plus en plus de pays et, à moins d’avoir un terrain de tennis dans son jardin, il est impossible de s’entraîner. La priorité sera de taper la balle quand les clubs ouvriront de nouveau et que le virus sera stoppé. C’est dur de se projeter dans le futur et encore plus dans notre domaine. Le tennis de haut niveau nous impose un minimum de voyages et si le virus commence à s’estomper dans certains pays, ce n’est pas dit qu’il s’estompera ailleurs. Alors, laissons le temps au temps et profitons d’autres bonheurs. »

DR - Thomas Maheux

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