Gand : «Non aux droits virtuels»

Les avocats de France se mobilisent demain pour dénoncer le budget alloué par l’Etat à l’aide juridictionnelle, en 2011. Le bâtonnier du barreau de Poitiers, Philippe Gand (notre photo), explique pourquoi l’enveloppe prévue paraît « insuffisante » à quelques mois de la réforme de la garde à vue.

Romain Mudrak

Le7.info

Pourquoi demandez-vous une revalorisation de l’aide juridictionnelle ?

« Depuis quarante ans, le nombre de bénéficiaires de l’aide juridictionnelle a crû beaucoup plus vite que le budget dédié à celle-ci. Aujourd’hui, il s’élève à 300 millions d’euros et quelques indiscrétions nous donnent à croire que cette enveloppe pourrait légèrement baisser en 2011 pour atteindre 287 millions d’euros. Les indemnités versées aux avocats sont trop faibles. Mais au-delà, nous dénonçons le caractère virtuel de l’égalité d’accès au droit car, faute de moyens, dans certains barreaux, des justiciables n’ont plus accès à l’aide juridictionnelle. Et la réforme de la garde à vue qui s’annonce ne va pas arranger les choses. »

 

À ce sujet, le Conseil constitutionnel demande au gouvernement de modifier le mode de garde à vue avant juillet 2011. Pouvez-vous rappeler les raisons de cette décision ?

« Le Conseil constitutionnel estime qu’une personne placée en garde à vue doit être assistée d’un avocat dès la première heure. De plus, elle doit avoir accès au dossier d’instruction et savoir précisément les raisons de son interpellation. Actuellement, le prévenu peut être interrogé sans connaître les détails de l’enquête. Il est aveugle. C’est une atteinte aux droits de la défense. Or, le nombre de gardes à vue est passé de 100 000 à 800 000 en dix ans. »

 

Quelles seront les conséquences de cette réforme sur le budget 2011 présenté mercredi au Conseil des ministres ?

« Cette réforme devrait permettre aux justiciables d’être assistés d’un avocat, dès l’interpellation, ainsi que lors de toutes les auditions. Autant dire que cette nouvelle loi engendrera une explosion du budget de l’aide juridictionnelle, qui est déjà sous-dotée. C’est pourquoi l’Ordre des avocats craint, là encore, le caractère virtuel de ce droit. Les plus pauvres n’y auront pas accès. »

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