Les gifles à l’index

La Fondation pour l’Enfance a lancé, jeudi dernier, une double campagne TV et Internet pour lutter contre l’usage de la gifle sur les enfants. Les violences éducatives sont sur la sellette. Mais où commencent-elles réellement ?

Nicolas Boursier

Le7.info

Trente secondes pour convaincre. Trente secondes pour piquer au vif. Le clip diffusé, depuis jeudi, sur le Net et le petit écran, par la Fondation pour l’Enfance, ne laissera aucun parent indifférent.

On y voit une maman gifler sa petite fille, coupable d’avoir renversé son verre de jus d’orange sur la table. Et cette autre image, quasi immédiate, de la grand-mère, témoin de la scène, s’avançant vers sa progéniture, la prenant dans ses bras et lui demandant pardon. En conclusion, cette incrustation : « Des parents qui battent leurs enfants ont souvent été des enfants battus. » Puis cette autre : «Eduquons nos enfants sans violence, ni claques, ni fessées.» Et cette dernière : « Vingt-huit pays ont déjà interdit ces pratiques inefficaces et traumatisantes. » La France, pas encore ! S’y résoudra-telle? Le débat est ouvert.

Des cas à part


Philippe a vu cette vidéo. Pour lui, cela ne fait pas de doute, « la répression physique n’a jamais fait avancer les choses ». Papa de trois enfants, aujourd’hui pré-ados, ce Poitevin de 37 ans n’imagine même pas pouvoir lever la main sur ses rejetons. « C’est au-dessus de mes forces et de mes règles de vie. J’estime que l’on peut éduquer ses gamins, les faire évoluer et prendre conscience des réalités de la vie par la communication et l’écoute. J’ai toujours fait comme cela et ça marche. »

Sans doute toutes les familles ne se reconnaîtront-elles pas dans cet exemple «idyllique». Combien d’entre nous sont confrontés, chaque jour, à l’impulsion épidermique de la « main alerte » ? Les «fesses qui sentent la savate » trônent sur plus d’un canapé. «C’est vrai, confirme Laura, 43 ans, elle aussi mère de trois ados. Personnellement, je ne suis pas du genre à taper, mais il est des cas où le cerveau ne fait plus la distinction. » Lesquels ? « Lorsque mes enfants manquent de respect, à  leurs parents mais surtout aux voisins ou à tout autre adulte rencontré. Et puis, lorsqu’ils se mettent physiquement en danger ou mettent en danger la santé des autres. Là, je ne peux supporter. »

Légiférer ? Pour quoi faire ?

La peur libère bien souvent le venin de la révolte «claquante ». Faut-il adhérer ? Louis Tandonnet, chef de clinique au pavillon Tony-Lainé du centre Henri-Laborit, nuance. « Je ne verrais pas l’intérêt de légiférer. Car il y a, selon moi, une différence fondamentale entre l’acte de violence gratuit, propre à soumettre l’enfant et la fessée réprobatrice, assénée comme une alerte au débordement. »

Confronté, au quotidien, à des ados « difficiles », le psychiatre sait plus que tout autre ce que l’acte de soumission peut engendrer comme ravages. « Biologiquement, l’enfant n’a pas changé en trente ans. Sans doute a-t-il davantage besoin de s’affirmer. Réclamer son respect, c’est avant tout le respecter. Le faire évoluer, en acceptant qu’il délimite lui-même le cadre de son évolution. La violence physique outrancière est insupportable, mais la manipulation mentale l’est tout autant. »

L’inhibition psychique serait donc aussi destructrice que la violence physique. Le médecin l’assure. Tout en confirmant que, dans la très grande majorité des cas, les parents reproduisent sur leurs enfants ce qu’ils ont vécu dans leur jeunesse. Là-dessus au moins, le clip s’inscrit dans le concret. Pour le reste, chacun jugera.

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