« Traditionaliste, ce n’est pas infamant »

Supérieur général de l’Institut du Bon Pasteur, l’Abbé Philippe Laguérie a emménagé, pendant l’été, au Domaine de la Rivardière, à Migné-Auxances. Ce prêtre traditionaliste à la «grande gueule» assumée s’explique sur ses intentions… et revient sur quelques épisodes de son passé.

Arnault Varanne

Le7.info

Philippe Laguérie, comment positionner l’Institut du Bon Pasteur dans l’Eglise actuelle ? 
« L’Institut du Bon Pasteur est un regroupement de prêtres de droit pontifical (Ndlr : 27 aujourd’hui et 40 séminaristes), créé le 8 septembre 2006. Nous dépendons directement de Rome, mais nous ne sommes pas un ordre religieux. Notre supérieur n’est pas un évêque, mais le cardinal Levada et le Pape Benoît XVI au-dessus de lui. De ce fait, personne ne peut m’empêcher de m’installer ici parce que je suis un citoyen français, personne ne peut m’empêcher de dire la messe parce que je suis prêtre… » 

Pourquoi avoir jeté votre dévolu sur le Domaine de la Rivardière, à Migné- Auxances ? 
« Pour m’occuper vraiment du Bon Pasteur, j’ai été obligé de quitter ma paroisse de Bordeaux et d’aller à Paris, où j’ai été accueilli pendant un an au centre Saint-Paul, puis dans les Yvelines. Mais habiter chez les autres, lorsque vous êtes le patron, c’est toujours délicat. Des amis m’ont trouvé cette grande maison et payent la location. Des bruits ont couru que j’allais installer ici des séminaristes. C’est totalement faux. C’est vrai que notre séminaire, à Courtalin dans le diocèse de Chartres, est plein comme un œuf. Nous sommes obligés de louer des chambres en ville. Cela fait deux ans que je cherche un endroit en France. » 

Si ce n’est pour y ouvrir un séminaire, comment comptez-vous utiliser les  1 900 m2 de bâtiments à votre disposition ? 

« Ce que je vais faire ici, dans ces trente-trois pièces, c’est prêcher des retraites spirituelles. Pas pour des vieux ! Pour des gens qui passent trois-quatre jours ici. Ils ont des instructions et se ressourcent spirituellement. Ces retraites se dérouleront une semaine sur deux si tout va bien. » 

« Mgr Wintzer ? On s’entend très bien » 

N’empêche, votre arrivée suscite une certaine émotion. Mgr Pascal Wintzer, adminis- trateur apostolique de Poitiers, émet «des réserves (…) quant à vos bonnes pratiques ecclésiales». Que répondez-vous à ces inquiétudes ? 
« Les gens gardent le souvenir de l’abbé Laguerie curé de Saint-Nicolas-du-Chardonnet. J’ai été quatorze ans à la tête de cette immense paroisse parisienne. À l’époque, j’inter- venais régulièrement dans les médias… Dès que je me pointe quelque part, ça émeut mes « amis », les évêques et les prêtres. Mais vous vous apercevrez au bout de quelques semaines que tout se passe très bien. Mgr Wintzer est venu dîner ici. Il a été charmant et m’a donné quelques conseils… On s’entend très bien. » 

« Pas de sang sur les Mains » 

Le 27 avril 2010, l’émission « Les Infiltrés », sur France 2, avait dressé le portrait au vitriol de l’école Saint-Projet et de l’église Saint-Eloi, dont vous étiez proche… 

(il coupe) « C’est une saleté épouvantable et des calomnies invraisemblables ! Un infiltré envoyé par la bande à Pujadas a débarqué chez nous et s’est fait passer pour un catéchumène, puis a filmé un autre infiltré tenant des propos absolument scandaleux. Il y a eu deux procès, je les ai tous gagnés (…). Et ce n’est pas fini. J’ai attaqué Pujadas, Capa… et j’attends maintenant les procès. Des journaux ont écrit pendant six mois que nous avions des réunions fascistes dans les caves de Saint-Eloi. Il n’y a aucune cave là-bas ! Cette histoire nous a fait un tort considérable. » 

Acceptez-vous l’étiquette  de prêtre traditionaliste ?  
« Traditionaliste, ce n’est pas infamant. Les intégristes sont des poseurs de bombes. C’est honteux de parler d’intégrisme me concernant, je n’ai pas de sang sur les mains que je sache ! Ce terme d’intégriste a été inventé il y a quarante ans pour dénigrer ceux qui disent la messe en latin. Par définition, tout catholique est traditionaliste. » 

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CV express 

Philippe Laguérie a 58 ans. Ce prêtre traditionaliste, ordonné par Mgr Marcel Lefebvre en 1979, a dirigé pendant quatorze ans l’église Saint-Nicolas-du-Chardonnet, dans le Ve arrondissement de Paris, à laquelle on prête des affinités avec la frange catholique de l’extrême droite française. « Mis à la porte » de la Fraternité Saint-Pie-X, il a créé, en 2006, l’Institut du Bon-Pasteur. Face à ses détracteurs, Philippe Laguérie revendique une liberté de ton totale. A signaler qu’il ordonnera une messe (en latin) au Domaine de la Rivardière, dimanche 25 septembre à partir de 10h30. 

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