Philippe Croizon, héraut des mers

Amputé des quatre membres, Philippe Croizon a réussi, l’année dernière, l’incroyable exploit de traverser la Manche à la nage. En 2012, le Châtelleraudais s’apprête à relever un nouveau défi: relier les cinq continents. Un défi à la hauteur de ce nouveau messager des océans.

Arnault Varanne

Le7.info

C’est l’histoire d’un mec dont la vie aurait pu s’arrêter en 1994. D’un type foudroyé sur son toit, à 26 ans, par un arc électrique. D’un miraculé plongé dans le coma de longues semaines et amputé des quatre membres… Sans doute est-ce parce qu’il revient de l’enfer que Philippe Croizon apprécie tant les aventures extrêmes. Dix-sept ans après son terrible accident, le nageur longue distance s’apprête à remettre le couvert en 2012. « Après la traversée de La Manche, le 18 septembre 2010 (Ndlr: 13h26mn), j’ai eu un sentiment de joie énorme, mêlé à une grande tristesse. Comme si tout était fini. » 

Au lieu de vivre dans le souvenir d’un exploit mémorable, le nouveau chouchou des médias s’est instamment mis en quête d’un nouveau défi à sa mesure. « Je me suis dit: « Tiens, je vais traverser le détroit de Gibraltar, puis celui de Bering… Et j’ai demandé à Arnaud Chassery s’il voulait à nouveau m’accompagner. » 

Entre mai et août 2012, les deux nageurs, l’un handicapé l’autre valide, relieront les cinq continents à la nage (cf encadré). Tout un symbole. « Si deux pt’tits gars comme nous sont capables de créer un pont entre les continents, cela veut dire que nous ne sommes pas très loin les uns des autres. » 

Philippe Croizon le sait. Son statut d’homme public lui permet désormais de véhiculer des messages forts. Au-delà de sa «petite personne», le nageur promeut ainsi des valeurs telles que « le dépassement de soi » ou encore « la fraternité ». À chacune de ses apparitions télé, son capital sympathie grimpe en flèche dans l’opinion. Et pourtant, il « ne change pas », refuse même qu’on le mette « sur un piédestal ». 

« au bout de mon aventure » 


Reste qu’une aventure de près de quatre mois ne se prépare pas sur un plateau climatisé. Alors, entre deux apparitions médiatiques, Croizon s’entraîne dur. Au minimum trois heures par jour, à la piscine de Châtellerault ou au lac de Saint-Cyr. « Entre mai et septembre, j’étais à La Trinité sur Mer, détaille l’aventurier. Et, à partir de février, je serai avec Arnaud Chassery à Toulon, où la Marine nous met un bassin à disposition pour nous entraîner dans une eau à 3°C. » 

Avant de s’envoler vers la Papouasie Nouvelle-Guinée, première étape de son périple, Philippe Croizon sera au Cambbodge, en janvier, à l’invitation d’Handicap International. « Cette ONG fête ses trente ans en 2012 et j’irai voir sur place les dégâts que font les mines antipersonnel.» 

Tant pis pour la fatigue et le décalage horaire. Son périple asiatique ne le détourne pas de son objectif : « Nager au-delà des frontières ». Même le calendrier de l’actualité à venir (Présidentielles, Euro de foot, Jeux Olympiques, le laisse de marbre. « J’irai jusqu’au bout de mon aventure ! » C’est l’histoire d’un mec… 

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Les quatre fantastiques

Courants violents, cargos, requins, méduses au venin mortel… Les quatre étapes du défi de Philippe Croizon et Arnaud Chassery comportent des risques énormes. Les deux compères démarreront en mai, avec le passage de l’Océanie à l’Asie (25km, 15 heures de nage). Deuxième pont entre l’Afrique et l’Asie et même distance prévue, à partir de la station balnéaire d’Aqaba (Jordanie). Troisième étape début juillet, le détroit de Gibraltar (Afrique-Europe) et ses huit cent cinquante cargos par jour. Enfin, l’aventure se terminera en août avec la traversée du détroit de Bering, qui relie Asie et Amérique. Là, il s’agira de nager dans une eau entre 0°C et 3°C, au milieu des orques.
Plus d’infos sur www.nageraudeladesfrontieres.com 

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