LGV Poitiers-Limoges : quel bazar!

La très hypothétique ligne à grande vitesse entre Poitiers et Limoges provoque un tsunami de réactions depuis quelques jours. Après la Fnaut, le Conseil général a choisi de passer à l’offensive en attaquant, pour « abus de pouvoir », l’Etat « coupable » d’avoir entériné la Déclaration d’utilité publique, le 10 janvier.

Arnault Varanne

Le7.info

Le rapport Duron et la Cour des comptes l’avaient quasiment enterrée, l’Etat l’a relancée ! En publiant, il y a quinzaine de jours, le Décret d’utilité publique du tronçon LGV entre Poitiers et Limoges, le gouvernement Manuel Valls a ouvert la boîte de pandore des contestations. Opposée au projet, la ministre de l’Ecologie, des Transports et de l’Energie a fini par se résoudre à dire qu’elle avait signé le décret « par solidarité gouvernementale ». Et Ségolène Royal d’appeler les opposants à déposer un recours auprès du Conseil d’Etat. Ce que la Fédération nationale des associations des usagers des transports a fait derechef. 

 
L’opposition transcende les clivages politiques, mais suscite tout de même des tensions au sein de la famille socialiste. Ce matin, le président du Limousin Gérard Vandenbroucke a dit qu’il soutenait son alter ego de l’Aquitaine dans la course à la tête de liste socialiste pour les prochaines Régionales. A son goût, Jean-François Macaire se serait montré « trop frileux » dans son soutien au projet ferroviaire… Le patron de Poitou-Charentes n’a pourtant fait que rappeler une évidence : la ligne n’est pas finançable en l’état ! 
 
« Priorité à la RN147 »
 
Ce matin, en marge de la commission permanente, les élus du Conseil général ont adopté une motion sur le dossier. Vingt-huit conseillers généraux ont entériné le texte, soufflé par le socialiste Thierry Mesmin, du canton de Lussac-les-Châteaux. La collectivité va très officiellement « demander à l’Etat de retirer le décret » du 10 janvier, tout en «déposant un recours pour excès de pouvoir aux fins d’annulation dudit décret auprès du Conseil d’Etat». « La DUP, si elle devait être maintenue, aurait des conséquences importantes sur le Sud-Vienne », s’alarme Thierry Mesmin. A l’en croire, Réseau ferré de France aurait tout le loisir, pendant quinze ans, de procéder aux expropriations nécessaires à la construction de la ligne. 
 
L’épée de Damoclès au-dessus de la tête des habitants est pesante. De son côté, le vice-président du CG86 Guillaume de Russé estime que 10 000 hectares de terres agricoles seraient ainsi préemptées. Sans surprise, l’ancien maire de Montmorillon réaffirme une vieille priorité : « la mise à deux fois deux voies de la RN147 ». Seul Denis Brunet, au nom de « l’ouverture vers le centre de la France » et Jean-Daniel Blusseau ont fait entendre des voix dissonantes. Le chef de file des élus de gauche a fait valoir qu’il ne cautionnait pas le « véritable réquisitoire contre le Président de la République», contenu dans la motion, tout en pointant les «positions à géométrie variable de la droite départementale». Il a rappelé les déclarations d’un certain Jean-Pierre Raffarin sur le sujet, depuis sa fenêtre de Matignon jusqu’à celle de sénateur de la Vienne. Comme quoi, à droite aussi, la LGV donne le vertige ! 

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