Ils ont la peur au ventre

Un immense trou d’air au milieu du deuxième quart-temps a été fatal à un PB en plein doute. Aix-Maurienne vainqueur, la pression est de plus en plus forte sur les épaules poitevines, à quatre journées du verdict.

Nicolas Boursier

Le7.info

C’était donc le bon soir pour l’Hermine. L’un de ces soirs où l’on devine vite que le chat noir planqué, depuis plus de deux ans, dans la coulisse des confrontations avec le voisin poitevin, va enfin avoir le cou tordu.
 
Dommage pour le spectacle que ce mistigri-là ait eu davantage l’apparence d’un chaton de trois jours que celle d’un vieux matou solitaire, prêt à sortir les griffes à la moindre rebuffade. Dommage, oui, pour le spectacle et pour récompenser l’assiduité de ses supporters, que le PB n’ait montré les dents que douze minutes durant.
 
Car l’entame, messieurs dames, fut plutôt prometteuse. Le temps pour l’arrière-garde poitevine de contenir les velléités du duo Warren-Durham, muscles saillants sous le cercle, et voilà qu’Harley au lancer, Greer par-delà la ligne, composaient une partition des plus soignées. Mieux encore, le rentrant Soliman, joker de l’hiver, se payait d’abord le luxe de contrer la star nantaise Durham, puis de claquer un panier sur sa première tentative. Et la dernière de ce quart-temps inaugural, conclu sur un 22-19 au demeurant symptomatique des débats.
 
Un éclat d’obus
Des débats que le petit Thinon se faisait illico un devoir d’envenimer, en sortant un « three points » de derrière les fagots (27-21) au retour sur le parquet. Ogide en rajoutait une couche et le PB prenait, pour la première fois, ses aises (31-23).
 
Super, les gars ! Enfin, à la condition de tenir le choc. Car tel un avion en panne de réacteur, l’embarcation poitevine piquait aussitôt du nez, dans la moiteur suffocante de Saint-Eloi. Deux tours de cadran plus tard, elle n’avait plus qu’à se délester de sa honte, en constatant les dégâts : 31-35. 
 
-12 dans le fuselage, inconcevable ! Aussi inconcevable que la contestation inappropriée d’Ona Embo au cœur de cette bourrasque et de la « technique » infligée au meneur local. Du pain bénit pour des cinquièmes de la classe enfin sûrs de leur basket.
 
Nelhomme avait beau multiplier les rotations, faisant même entrer le petit Joumard en lieu et place du susnommé Ona Embo, rien n’y changeait. Surtout pas l’hébétude de Guillard, totalement à côté de son basket.
 
Certes, Poitiers pouvait encore compter sur un capitaine digne de confiance, en la personne de Jeff Greer, métronomique à longue distance. Insuffisant, hélas, pour rivaliser avec l’insolence de Morlende et Relphorde par-delà la ligne et la plus grande constance des hommes de Collineau. 38-53 à la pause. Déjà inquiétant !
 
Un concert de solistes

Bon alors, et maintenant ? Une petite révolte allait-elle germer dans l’apathie générale ? Pas du côté de Guillard, vite renvoyé sur le banc, ni dans la main d’Ona Embo, incroyablement fébrile. Soliman et Greer, eux, étaient encore les seuls à surnager. Combien de temps ? Eh bien, celui de comprendre qu’avec un Relphorde aussi précis à six mètres et une indigence aussi chronique de ses propres hommes, rien ne pourrait arriver à l’adversaire. Et rien n’allait plus arriver. Ah si, un superbe contre solitaire d’Harley, sanctionné par… un raté sous le panneau. Le contre, lui, ne pardonnait pas. 2+1 et 68-51 pour l’Hermine. Le résumé du match, s’il ne fallait en retenir qu’un.
Les quelques éclairs de génie à suivre (Kanté à trois points !) faisaient au-delà bien pâle figure face à la sobriété nantaise, illustrée par une paire Warren-Durham tranquille pépère dans tous les coins de la raquette (57-74).
 
Est-ce trop dur d’écrire qu’à cet instant précis, les Poitevins, somme d’individualités hiératiques, faisaient pitié à voir ? Tant pis pour le blasphème. Car franchement, tout Saint-Eloi avait mal pour eux. Encore davantage lorsque Warren, puis Calvez transperçaient le filet de missiles longue portée  (61-83). La suite ? Est-ce bien utile ? Un beau baroud d’honneur de l’intermittent Ona Embo à trois points et une fin de partie au-delà bien gérée par les gars de Loire-Atlantique.
 
Eux jouent encore les quatre premières places. Le PB, lui, a encore le spectre des deux dernières devant les yeux. A chacun son karma…

Photo Mickaël Planès
 
 
LA FICHE
Gymnase Saint-Eloi. 2207 spectateurs. Arbitrage de MM. El Faiz et Boubert. Poitiers Basket 86 - Hermine Nantes : 80-90. Mi-temps : 38-53. Score par quart-temps : 22-19, 16-34, 19-20, 23-16.
PB86 : Ona Embo 22, Harley 17, Greer 12, Guillard 2, Fitzgerald 7, puis Ogide 6, Thinon 5, Soliman 4, Kante 5, Joumard 0. Entraîneur : Ruddy Nelhomme.
Hermine : Calvez 9, Gayon 0, Relphorde 20, Warren 11, Durham 20, puis Nkounkou 6, Desespringalle 12, Morlende 8, N’Diaye 4. Entraîneur : Franck Collineau.
 
 
Ils ont dit
Ruddy Nelhomme, entraîneur du PB 86 : « On sort du match cinq minutes et on traîne notre boulet jusqu’à la fin. Je peux accepter que l’on connaisse des trous d’air, mais pas que l’on baisse la tête à ce point. Face à une équipe qui surfe sur la dynamique du succès, hyper intense au rebond et pas malheureuse à mi-distance, il aurait fallu être à 100% pendant quarante minutes. On ne l’a pas été, point barre. Maintenant, il faut que l’on se serre les coudes, que l’on soit présents tous ensemble, pour aller chercher les points qui nous manquent. »
 
Franck Collineau, entraineur de l’Hermine : « Cela faisait tellement longtemps que l’on courait après cette victoire sur Poitiers… Ce soir, on a tué le chat noir et j’en suis fier. Je suis surtout fier des joueurs, qui ont respecté les consignes à la lettre et fait montre d’un super dévouement. Tout le monde a apporté sa pierre à l’édifice et c’est ce qui me satisfait le plus. Nous avons toujours notre destin entre les mains. Je savoure. »
 
Pierre-Yves Guillard, intérieur du PB 86 : « On peut parler de non match, surtout si l’on fait référence à ce deuxième quart-temps catastrophique On a été bouffés dans l’intensité et dès que cela a mal tourné pour nous, on n’a pas su relever la tête. Je n’ai pas senti de rage collective, chacun a voulu faire son numéro. On a vu ce soir la différence existant entre une équipe en pleine confiance et une autre qui se débat dans le doute. »
 

Jeff Greer, ailier et capitaine du PB 86 : « Nantes a énormément de confiance en cette fin de saison et capitalise dessus. A l’inverse, nous jouons par séquences, sans constance, sans énergie sur la durée. Cette défaite, conjuguée aux victoires de Souffel et Aix, confirme le fait que nous allons devoir nous battre jusqu’à la fin. Ce n’est pas le moment de baisser les bras. » 

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