Made in Pwatooland

Jean-Philippe Vriet. 45 ans. Graphiste multicartes. Partage la paternité de la marque identitaire DD du Pwatoo avec Frédéric Trouvat. La région APOIL, c’est lui ! Itinéraire d’un garçon discret, aux racines ancrées.

Arnault Varanne

Le7.info

En CP, l’un de ses dessins avait épaté la maîtresse. A l’époque, Jean-Philippe Vriet s’était fendu d’un cheval, dont la robe allait visiblement tracer sa carrière. Quatre décennies plus tard, le succès de « son » DD du Pwatoo -un autre équidé- a largement dépassé les frontières de la Vienne. Et pas seulement sur les réseaux sociaux puisque t-shirts, mugs, tongs et autres chapeaux à l’effigie du mulet s’arrachent comme des petits pains. « Si je suis fier ? Je ne sais pas. Surpris, c’est certain ! » Ses premières esquisses, après que Fred Trouvat lui a soumis ce projet de marque identitaire, il y a deux ans et demi, provoquèrent d’ailleurs une certaine réserve . « Auprès de mes proches, ce fut même un bide ! », n’hésite pas à dire le papa de Nino, 5 ans.

La suite lui/leur a donné raison. Parce que « DD » est « un peu impertinent », « sympa » et « léger », il plaît dans tous les foyers. Et puis, la plus « Pwatevine » des têtes de mule s’exprime à bon escient, avec cette touche d’humour et de connaissance de l’actu propre à susciter sourire en coin et... viralité. A ce titre, le fameux « Vous quittez la région APOIL » -« une sacrée aventure ! »- a constitué un accélérateur de notoriété. Une sorte de fulgurance jubilatoire que son paternel Jean-Philippe revendique, même si sa personnalité s’accommode aussi d’une certaine discrétion.

« Les gens me fascinent »

L’ex-directeur artistique de l’agence de communication Projet Atlantique, à Niort, est un « cérébral » au regard bienveillant sur les choses et les gens. Les gens ordinaires, mais aussi les personnalités. « Je suis fasciné par leur destin, les chemins qu’elles empruntent. Leur passion, leurs obsessions parfois couplées d’une énorme persévérance pour y arriver envers et contre tout, me fascinent », esquisse-t-il. La sienne de persévérance l’a conduit à fréquenter l’Ecole nationale supérieure des arts appliqués et des métiers d’art, à Paris. Mais son côté « plus littéraire que scientifique » l’a éloigné du design et de l’esthétique industrielle, pour le ramener vers la communication traditionnelle... et le Poitou. « Mon père a très longtemps travaillé dans la presse et, tous les midis, il ramenait le journal. J’ai donc toujours beaucoup lu, en ayant les doigts noircis par l’encre ! Je pense que ça a été fondateur. »

« L’élégance et la pudeur »

D’hier à demain, le graphiste accompli mesure le chemin parcouru... sans toutefois se reposer sur ses lauriers. D’un naturel « inquiet et stressé », il sollicite ses méninges en permanence. Sans doute pour se rassurer. Peut-être le revers d’une sensibilité à fleur de peau. Même s’il reconnaît que « des choses glissent sur lui », ce tennisman de bon niveau peine à esquiver tous les coups. Comme tant d’autres, les attentats du Bataclan l’ont « beaucoup secoué ». D’une manière générale, le Poitevin accorde « énormément d’importance » à l’actualité et à ses contemporains. Au rayon culturel, là encore, sa sensibilité s’exprime. Du romancier Philippe Jaenada, il a apprécié la description « classe et humaniste » d’un gangster dans « Sulak ». D’Hubert Mounier, ex-chanteur de l’Affaire Louis Trio, qu’il a redécouvert récemment, il adore « l’élégance et la pudeur ». En particulier dans « Voyager léger et loin ». « J’aime les musiques légères et plus profondes, pour différentes raisons et différents moments. »

Comme sa compagne infirmière libérale, Jean-Philippe apprécie aussi le sud de l’Italie. « Ce qui me touche là-bas, c’est une certaine grâce, comme une élégance innée. Et aussi ce contraste violent entre austérité, aridité, chaleur et douceur. C’est assez fort ! » On est loin de « DD », du Poitou et des contingences du quotidien, dans lesquelles Jean-Philippe Vriet se débat comme n’importe quel travailleur indépendant. Car contrairement à ce que laissait penser Nino jusqu’à l’année dernière, son paternel n’élève pas des baudets ! « C’est ce que son ancienne maîtresse avait compris. » Quel farceur, ce DD du Pwatoo !

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