France Business school, autopsie d’une « fusion ratée »

La Cour des comptes a dévoilé aujourd’hui son rapport annuel, qui contient une quarantaine de pages sur la « fusion ratée » de France Business School, dont l’Escem Tours-Poitiers-Orléans était partie prenante. Montant de la douloureuse : 36M€. Les principaux extraits…

Arnault Varanne

Le7.info

Gouvernance déficiente, ambition internationale démesurée, comptabilité totalement désorganisée, climat social détérioré… En se penchant au-dessus du berceau de la défunte France Business School, la Chambre régionale des comptes de Nouvelle-Aquitaine a levé le mystère sur ce qui restera comme l’un des plus gros flops de fusion entre des écoles de commerce. En l’espèce, le projet initial visait à regrouper l’Escem Tours-Poitiers-Orléans, ainsi que les écoles d’Amiens, Brest et Clermont. Dans leur présentation, les magistrats pointent les germes de la dissolution, intervenue en 2015, après seulement deux années scolaires pleines. Les voici…

La gouvernance
« Les membres de l’association (…) n’étaient parfois pas, comme dans le cas de l’école d’Amiens, les représentants des financeurs réels. Le syndicat mixte de l’Escem disposait du même nombre de représentants et de droit de vote que les autres membres, alors que sa cotisation représentait près de 50% de l’ensemble. »

« L’échec » de la stratégie de recrutement
L’abandon du traditionnel concours d’entrée aux grandes écoles au profit de « Talent days » s’est révélé, là encore, catastrophique. « En 2013, pour la première rentrée de FBS, 807 candidats s’y sont présentés. 721 ont été admis, soit un taux d’admission de 90% et 345 se sont finalement inscrits. Les recrutements ont baissé de 77% pour la première année scolaire de FBS. La dégradation de l’attractivité de l’école fut encore plus forte l’année suivante puisqu’elle ne parvint à recruter que 181 étudiants au sein du programme grande école, soit une baisse de 90% par rapport à l’année scolaire 2011-2012. »

Une ambition internationale démesurée
« Le projet du directeur général était de créer un « réseau mondial » dont le siège serait à Singapour et qui développerait son activité dans douze pays. La décision d’une implantation permanente de FBS en Chine a été prise par le directeur général dès sa prise de fonctions. L’école ne disposait pourtant pas de la surface financière nécessaire… »

Des prévisions trop optimistes
Faute de « financements propres associatifs », FBS s’est très vite retrouvée dans une situation financière compliquée. « Le président de l’association et les membres fondateurs ont partagé des prévisions d’activité trop optimistes. (…) Le plan de financement prévoyait un chiffre d’affaires de 42,5M€ dès 2013, celui-ci s’est établi à 33M€. »

Un « nombre important » d’irrégularités
Parmi les nombreuses irrégularités relevées dans la gestion de France Business School, la Chambre régionale des comptes pointe en particulier le cas du recours à l’organisme « New World University by Esfa ». « Cette prestation a été attribuée à la société du directeur général pour une somme importante, sans que la conclusion de ce contrat n’ait fait l’objet d’une procédure de passation formalisée. » Idem avec un contrat attribué à « une société en communication » pour plus de… 500 000€.

Les conséquences sociales
En juin 2015, date de la liquidation amiable de l’association, 458 personnes travaillaient pour FBS sous divers statuts : « Les collaborateurs de la direction générale (à Tours, ndlr) et des campus d’Amiens et de l’Escem ont connu 268 licenciements. Au total, après reclassements, la dissolution de l’association FBS a donc entraîné la suppression de 181 emplois. » A signaler que 85 étudiants de l’Escem et du campus d’Amiens n’ont pas obtenu le diplôme souhaité (grade de master), alors qu’ils ont déboursé 19 000€ de frais de scolarité.

Les conséquences financières
La Chambre régionale des comptes évolue à 36,6M€ le surcoût total du projet France Business School. Sur ce montant, 21,1M€ sont supportés par les financeurs de l’Escem Tours-Orléans-Poitiers (chambres de commerce et d’industrie, Ville de Poitiers, Département…). Et les magistrats de préciser que le Département de la Vienne a abondé cette somme à hauteur d’1,23M€. 

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