Désinformation : la riposte s’organise

A l’heure où la frontière entre vraies infos et actualité bidon est de plus en plus poreuse, Google News avec « Crosscheck » et Le Monde avec « Décodex » organisent la riposte. Depuis Poitiers, Hoaxbuster fait ce travail depuis plus de quinze ans...

Arnault Varanne

Le7.info

La semaine dernière, Guil- laume Brossard a réalisé un joli scoop. Le co-fondateur du portail hoaxbuster.com a décroché un entretien exclusif avec Eve Plenel, la fille du fondateur de Médiapart, mise en cause sur les réseaux sociaux pour un « supposé emploi à la mairie de Paris payé 3 000€ alors qu’elle habiterait Berlin ». Dans l’entretien, la coordinatrice de Paris sans Sida rétablit les faits, sur sa rémunération, son emploi du temps, son statut... Sera-ce suffisant pour contrer l’offensive des amateurs de « réinformation », comme les appelle Hoaxbuster.com de façon policée ? Pas sûr...

Pourtant, la première ressource francophone sur les canulars du Web ne ménage pas sa peine pour combattre les « chevaux de Troie » du Net. A telle enseigne que Le Monde l’a classée en vert dans sa base de données de quelque six cents sites ou sources d’information, rangées derrière la bannière Décodex (voir colonne). Le petit frère des Décodeurs est « un outil qui vise à lutter contre la diffusion virale de fausses informations et à aider les internautes à se repérer dans la jungle des sites pro- ducteurs ou relayeurs d’infos », précise le journal du soir.

« Indispensable état des lieux »

« Dans la foulée des Décodeurs du Monde, de Libé Désintox ou d’autres portails, Décodex fait ce que nous faisons avec plus de moyens, éclaire Guillaume Brossard. Il est important de rappeler que les médias traditionnels ne sont pas là pour désinformer. C’est indispensable d’avoir un état des lieux des journaux classiques, de ceux qui font la réinformation, des sites parodiques... Maintenant, Decodex n’a de valeur que celle qu’on veut bien accorder aux gens du Monde ! Hélas, une partie de la population a perdu confiance. »

Dans le registre du « fact checking », une autre initiative du même acabit va voir le jour le 27 février. Le réseau First Draft News et le Google News Lab ont décidé de s’associer à seize rédactions françaises pour lancer un outil de vérification des infos sur le Web, en rapport avec la Présidentielle. Facebook en développe un de son côté. Ce qui semble être une excellente nouvelle, quand on sait le nombre de «hoax» qui circulent sur le réseau social. « J’ai fait l’expérience de créer un faux profil Facebook, té- moigne le fondateur d’Hoaxbuster.com. En quelques semaines, je me suis retrouvé en circuit fermé par rapport aux infos que mes « amis » publiaient. » Bienvenue dans le monde des algorithmes...

 

 


Post-vérité
Ainsi donc, nous serions entrés de plain pied dans l’ère de la post-vérité. Aux Etats-Unis, Donald Trump et son état-major ont façonné pendant de longs mois la théorie de la vérité alternative. Ou comment revisiter des événements en niant les évidences élémentaires. Sous nos contrées, les partisans de candidats à la Présidentielle en difficulté -suivez mon regard- procèdent de la même logique, criant haro sur les médias traditionnels, accusés de rouler pour tel ou tel lobby. Cette défiance, si elle n’est pas nouvelle, se trouve renforcée avec la montée en puissance de sites de désinformation. Lesquels trouvent dans les réseaux sociaux des accélérateurs de notoriété inouïs. La faculté des algorithmes à vous « enfermer » dans des bulles, à ne vous confronter qu’à des gens qui vous ressemblent et pensent comme vous, s’avère très dangereuse. La démocratie se fonde sur une série de piliers, dont la presse fait évidemment partie. Bien évidemment, le quatrième pouvoir ne doit pas échapper à un examen de conscience. Mais de là à souhaiter qu’il disparaisse sous une vague populiste... 

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