Pensions alimentaires : la Caf s’attaque aux impayés

Une nouvelle Agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires (Aripa) vient de voir le jour. Elle renforce le pouvoir des caisses d’allocations familiales et le niveau d’information auprès des familles monoparentales.

Arnault Varanne

Le7.info

Aurélie est « épuisée ». Depuis octobre dernier, son ex-mari a cessé de lui verser les 120€ mensuels de pension alimentaire, somme fixée par le Juge aux affaires familiales au moment du divorce. « Nous avons eu une grosse dispute au sujet du mode de garde de notre fille de 6 ans, explique la mère de famille. Il a décidé de ne plus la voir et donc de ne plus payer la pension. » 

Aurélie n’est pas un cas isolé. En France, 30 à 40% des pensions alimentaires sont totalement ou partiellement impayées. C’est précisément pour agir sur ce phénomène que l’Agence pour le recouvrement des impayés de pensions alimentaires (Aripa) a vu le jour. Créé en janvier et piloté par la Caisse d’allocations familiales, ce dispositif succède à une expérimentation menée pendant deux ans dans une vingtaine de départements, dont la Charente(1). Le principe ? Simplifier les démarches des usagers, recouvrer les impayés jusqu’à vingt-quatre mois en arrière et offrir aussi la possibilité d’une médiation financière entre ex-conjoints, notamment pour prévenir les conflits après une séparation (2).

Une communication à développer

Une chance pour Aurélie qui compte se saisir de l’Aripa le plus tôt possible. Jusqu’alors, la Poitevine n’avait jamais entamé de démarches auprès de la Caf pour bénéficier du soutien financier auquel elle pouvait pourtant prétendre. « Quand on est dans une situation difficile, on n’a pas la tête à affronter les tâches administratives, lâche-t-elle. Je ne savais pas comment m’y prendre, ni vers qui me tourner. » « Notre mission de recouvrement des pensions alimentaires est méconnue », déplore Tania Conci, directrice de la Caf de la Vienne. 

En 2016, l’organisme s’est pourtant substitué à 185 parents négligents (1) -des pères, dans l’immense majorité des cas-, parfaitement solvables, mais qui se soustraient volontairement à leurs obligations. Dans ce cas de figure, la Caf se charge de récupérer les sommes auprès des employeurs ou de Pôle Emploi. Au total, la Caisse a recensé 1 342 procédures, dont 58% se sont résolues à l’amiable. 
L’un des enjeux majeurs porte sur la prévention. Quand on sait que seuls soixante-dix couples ont bénéficié du service de médiation familiale de la Caf en 2016 (alors que plus de 3 100 séparations ont été recensées), on mesure le chemin à parcourir…

(1) Le taux de recouvrement est passé de 43% à 49% entre 2014 et 2016 grâce à la Garantie contre les impayés de pensions alimentaires. 
(2) Toutes les infos sont désormais centralisées sur le portail www.pension-alimentaire.caf.fr ou accessibles via un simple coup de fil au 0821 22 22 22. 

 

Des chiffres qui parlent
Sur les 42 000 allocataires de la Caf, 11 654 sont des familles monoparentales. Près de 40% d’entre elles (4 585) touchent une allocation de soutien familial pour un montant moyen de 170€. Au total, près de 8 000 enfants bénéficient ainsi de ce coup financier, sans lequel leur parent aurait du mal à boucler son budget mensuel. Un autre élément nouveau : l’allocation de soutien familial complémentaire. Les parents peuvent bénéficier d’une cinquantaine d’euros supplémentaires (62€ dans la Vienne, pour 66 familles), dans les situations où le montant de la pension s’avère faible. 
Les pensions alimentaires impayées peuvent être lourdes de conséquences pour les familles. Vanessa en sait quelque chose. Ses parents ont divorcé alors qu'elle avait 19 ans. La jeune femme venait de débuter des études en Langues littérature civilisations étrangères. "Mon père devait verser une pension de 250€ par mois pour l'éducation de ma soeur et de moi-même, explique-t-elle. Il l'a fait quelques mois, puis a arrêté en nous disant que sa famille était désormais celle qu'il constituait avec sa nouvelle compagne." La situation financière de la mère de Vanessa s'est fragilisée. "Ma mère a essayé de faire appel à un huissier, mais mon père était soi-disant insolvable. Elle s'est battue puis, fatiguée, a laissé tomber. Ma soeur préparait médecine. Moi, j'ai décidé d'arrêter la fac pour travailler car maman ne pouvait plus assumer seule…" Vanessa s'est sacrifiée. A 32 ans, elle s'apprête justement à reprendre ses études. Treize ans après…

À lire aussi ...