Malik Djoudi savoure sa renaissance

Malik Djoudi. 38 ans. Après plusieurs projets en groupe, l’auteur-compositeur-interprète poitevin se forge un nom en solo. Faux introverti, autodidacte talentueux, il se démarque de la scène culturelle française par un profil singulier.

Marc-Antoine Lainé

Le7.info

Derrière les lunettes noires, un regard apaisé. A la terrasse du café de son cousin, en centre-ville, Malik Djoudi profite des derniers beaux jours de l’année. « Je me sens bien ici, à proximité de ma famille et de mes amis. » Rue Magenta, il est connu comme le loup blanc. Pas une minute ou presque ne s’écoule sans qu’un passant ne vienne le saluer. Poitiers l’a vu naître il y a trente-huit ans. Et éclore tout récemment.

Depuis la sortie de son album  « Un », le 7 avril dernier, sur le label La Souterraine, l’auteur-compositeur-interprète croule sous les sollicitations des journalistes estampillés « culture ». France Inter, Libération, Les Inrocks, Tsugi... Malik Djoudi découvre « avec bonheur » les feux des projecteurs, sans perdre de vue que « tout cela peut être éphémère ». Au contraire des artistes qui rencontrent le succès très jeunes, lui fait preuve d’une maturité sans faille. « J’aurais honte de péter plus haut que mon cul, lâche-t-il. Peut-être que mon parcours m’offre plus de hauteur de vue. Mon entourage, sur lequel je peux me reposer, m’apporte de la sérénité. »

Itinéraire d'un succès annoncé

En dehors de son actualité, Malik Djoudi se dévoile peu. De son enfance, le natif de Poitiers évoque les trajets à pied vers le marché, au cours desquels sa mère et lui entonnaient les chansons populaires de l’époque. Biberonné à Gainsbourg, Supertramp et aux Doors, l’artiste se découvre très tôt une attirance pour la musique, qu’il n’apprend pas pour autant. « Je n’ai pas de notions de solfège. Ne me demandez pas de jouer en Fa mineur, je ne saurais pas le faire. » L’instinct, sinon rien.

A 18 ans, son bac en poche, le jeune homme file à Paris prendre des cours de chant avec Klaus Blasquiz, du groupe Magma, et multiplie les expériences professionnelles dans la pub, le cinéma, la télévision. De retour sur les rives du Clain, sept ans plus tard, Malik Djoudi enchaîne les projets collectifs, Moon Pallas et Kim Tim entre autres, qui l’emmènent sur les scènes de France et de Navarre. Le voyage fait d’ailleurs figure de fil rouge. Des cinq continents, seule l’Océanie n’apparaît pas dans ses carnets. « Je me suis enrichi culturellement, mais surtout humainement, au gré des rencontres », commente-t-il. Il y a deux ans, le décès de sa grand-mère l’a conduit sur les traces de ses aïeuls, au Vietnam. Un mois et demi de déconnexion totale. Et un tournant décisif dans sa carrière.

Le français comme exutoire

Les réponses s’allongent à mesure que l’entretien avance. Pour le lancement de son projet solo, le Poitevin a fait le choix délibéré de chanter en français. « Jusque-là, je n’écrivais qu’en anglais. Avant le Vietnam, je n’aurais jamais pensé me mettre autant à nu. » Malik Djoudi a « écrit, composé et produit 100% » des huit titres de son album « Un ». A sa manière. Quand certains pensent les paroles puis composent, lui préfère poser des mots sur ses mélodies « tout droit sorties de (sa) tête ». « Je chante d’abord en « yaourt », puis je trouve les phrases qui s’alignent sur les sonorités. » Cet atypisme a séduit son nouveau manager Chet et le label Cinq7 (Philippe Katerine, The Do, Bertrand Belin...) qui vient de produire la sortie physique de son album. Sa voix « féminine », telle que décrite dans les chroniques parues ces dernières semaines, lui vient d’un épisode insolite du passé. « Avec mon ami Julien Lepreux, nous avons écrit plusieurs chansons pour Camille Berthomier (aujourd’hui membre du groupe Savages, ndlr). Je les entonnais en imaginant que c’était elle qui chantait. C’est resté. »

Son inspiration, Malik Djoudi la puise dans « le voyage, le lâcher-prise, l’amour et le calme ». Quatre thèmes qui lui sont chers et le caractérisent. Au jeu du portrait chinois, l’artiste indique être amateur de bon vin, de roller, « juste mais parfois dans les nuages ». Il lit « Le pouvoir du moment présent » d’Eckhart Tolle et a fait sienne la citation d’Oscar Wilde : « Les folies sont les seules choses qu’on ne regrette jamais. » En se projetant dix ans dans le futur, l’artiste à la renommée grandissante espère « simplement pouvoir faire ce (qu’il) veut ». Rien de plus, rien de moins. A Poitiers ou ailleurs, mais jamais trop loin de ses proches.

Crédit photo : DR - Vincent Sannier

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