Poitiers, planète rap en devenir

Le Poitou, terre de metal… Mais pas que ! Partout dans la Vienne, de nombreux artistes et groupes écrivent, composent et chantent du rap, du hip-hop ou du slam. Poussés par une jeune émission de radio, ils aspirent enfin à se montrer sur scène.

Steve Henot

Le7.info

Ils ont entre 18 et 21 ans, ont fait leurs premières battles de rap sur Instagram, lycée contre lycée (« LVL »). Les six jeunes Poitevins du groupe Le Labo seront en concert, le 19 février, à 19h30, à la Rotative de Buxerolles. Quelques mois après leur première scène, à Civray, pour les « Off » du festival Au Fil du Son. « On va donner tout ce que l’on a », prévient Enzo, alias Deuzio, l’aîné du groupe bercé aux sons d’IAM et NTM.

Le jeune collectif est invité par « T’as Capté », le programme qui squatte les ondes de Radio Pulsar chaque mercredi soir, de 19h à 21h, depuis la fin 2018. Sur le modèle de « Planète Rap », créneau phare de la radio Skyrock, l’émission accorde à l’antenne autant de place aux rappeurs nationaux qu’à ceux du cru. Et ouvre son micro à tous, artistes ou amateurs, pour de furieuses impros. « Le rap fait partie des mouvements musicaux en vogue, observe Patrice Mancino, le directeur de Radio Pulsar. Ce programme fait vivre le studio au sens propre comme au figuré. C’est l’expression typique de l’effervescence associative pictavienne, qui fait se croiser les gens. »

Une dynamique s’amorce

Musique la plus écoutée de France en 2019 (cinq artistes dans le top 10 des ventes), le rap est largement répandu dans les quartiers populaires de Poitiers et Châtellerault, et même dans les communes rurales. « Avec des amis, on a fait le constat que Poitiers n’avait pas compris les jeunes, explique Benjamin Mie, le cofondateur de l’émission. Personne ne faisait quelque chose pour que le rap s’y développe. On a donc voulu crédibiliser les jeunes d’ici, et surtout leur proposer un lieu d’échange où l’art se partage. »

A travers toute sa richesse (trap, hip-hop, slam), ce genre musical s’immisce petit à petit dans les programmations du coin. Le Confort moderne, par exemple, a accueilli plusieurs rappeurs sur scène, ces derniers mois (Georgio, le Poitevin KillASon, 13 Block, Kaden…). Aussi, la première demi-finale du tremplin de Vouneuil-sous-Biard, il y a quelques jours, était dédiée aux musiques urbaines. « Près de 70% des candidatures étaient des groupes de hip-hop, cela veut dire qu’il y a un vivier. On a voulu leur donner une chance », souligne Fred Meyer, membre du jury. Reste que ce petit monde se montre surtout actif sur la toile, plus que sur scène. « C’est un genre un peu underground (sous-terrain) à Poitiers, mais il existe ici beaucoup de talents », assure MINS, un rappeur poitevin. « Cette scène a encore peu de lieux de diffusion », ajoute Fred Meyer.

C’est pourquoi « T’as Capté » se démène pour organiser des concerts dans des bars et des petites salles... Une dizaine d’événements à l’année. Et ce n’est qu’un début. « On a lancé une dynamique, mis un coup de pied dans la fourmilière », veut croire Benjamin. Avec 133 artistes reçus en 2019, son émission tend à prouver que le rap peut exister localement, aux côtés du rock et du metal (lire le n°451).  « Ce sont des choses comme ça qui font que le rap grandit », soutient Deuzio. A suivre !


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