Poitiers/Etudiants : à distance malgré eux

A défaut de savoir quand ils pourront à nouveau partager avec leur promo les cours sur le campus, les étudiants s’adaptent et tentent de ne pas décrocher. Un vrai défi, scolaire mais aussi social.

Claire Brugier

Le7.info

Le campus de Poitiers est quasi-désert. On est loin de l’effervescence habituelle. La crise sanitaire est passée par là et, depuis un an, de confinement en déconfinement, les étudiants composent avec des cours en « distanciel ». « Enfin, quand ça fonctionne. Il ne faut pas que ça bugge !, commente Inès, 
20 ans. Après il faut aussi tenir le rythme des visios. Les professeurs font des monologues, avec le décalage il est compliqué de poser des questions… » Bref, la solution n’est pas idéale et il serait tentant de décrocher. Pour autant, la jeune Niortaise, en 2e année à l’Ecole de sages-femmes, n’a pas déserté le campus. « L’an dernier, je suis rentrée chez mes parents et j’ai passé tout le second semestre en confinement. Moralement, c’était plus compliqué. "

Depuis octobre et l’arrêt des cours en présentiel, Inès a adopté une autre stratégie. Tous les matins, elle franchit le seuil de la Maison des étudiants. Elle y retrouve Justine. « Cela permet de se motiver, de retrouver un rythme et un cadre. » La jeune Bressuiraise fait partie de la même promo. A 26 ans, elle est en reconversion après des études en sciences politiques à Rennes. Elle a déjà connu la vie active… et une autre vie étudiante. « Là c’est hyper-triste. J’ai eu la chance d’être étudiante avant la Covid, j’ai pu vivre des cours en direct et une vie sociale intense, les fêtes... »

« On est pris
 au dépourvu »

La routine studieuse que les deux jeunes femmes ont instaurée les préserve de la démotivation. « On s’installe chacune dans notre coin, on se pose nos questions à travers la salle », confie Inès. « On peut échanger sur les choses que l’on n’a pas comprises… » complète Justine. Quant aux groupes WhatsApp, Instagram et autres créés par la promo de 25 élèves, « cela permet surtout de se sentir étudiantes sages-femmes. D’autant que l’on n’a pas eu le temps de se connaître à la rentrée », confie Inès.

Pour les étudiants en première année, l’acclimatation a, de fait, été plus que réduite. « Déjà que j’ai eu le fameux bac-qui-ne-compte-pas !, s’indigne Charlotte, en L1 de droit. Heureusement, j’ai retrouvé dans ma promo un ami qui redoublait. Grâce à lui j’ai appris beaucoup de choses sur la fac. » Ce lien a aussi atténué l’isolement ressenti par beaucoup, et pas seulement les étudiants internationaux (Le 7 n° 487). Un court questionnaire diffusé en ligne par l’Afev(*) début novembre en témoigne. Dans une majorité des 230 réponses, les étudiants déplorent la perte d’interactions sociales. A cela s’ajoute la difficulté de se projeter, qui mine leur moral. « On est pris au dépourvu par ce qui se passe et il n’y a personne pour nous expliquer quelles conséquences cela aura sur nos vies futures. On nous dit : vous êtes jeunes, vous avez toute la vie devant vous, arrêtez de stresser ! Mais on n’a aucune base… », constate Sarah, en L2 de lettres et langues. Dans sa promo, un Drive en ligne permet aux étudiants de partager et compléter leurs cours. Pour le reste, « ceux qui avaient déjà des liens entre eux les ont gardés, mais pour certains ce n’était que des relations de camarade à camarade, note Sarah. Or, lorsqu’on ne va pas bien, on ne va pas se confier à des personnes que l’on connaît peu… »


(*)Association de la fondation étudiante pour la ville.

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