Le fragile destin des surplus de jardin

Des tonnes de fruits et légumes se perdent chaque année dans les jardins de particuliers, dans l’indifférence générale ou presque. Et si on donnait aux cerises, pommes, courgettes ou poireaux une deuxième chance… de se faire manger ?

Claire Brugier

Le7.info

« Nous habitons depuis trente ans à Biard, dans une vieille maison que nous avons rénovée, avec un grand jardin. Et dans ce grand jardin… » L’histoire de Françoise Hughes-Magnard commence comme un conte pour enfants. « Dans ce grand jardin, poursuit-elle, il y a beaucoup de cerisiers. Au début, ils étaient petits, ils ne donnaient pas beaucoup. Mais les enfants ont grandi et les cerisiers aussi. Et désormais, tous les ans, ils produisent des tonnes de cerises ! Même les années où personne n’en a ! » La gourmandise des amis, des voisins et même des oiseaux n’y suffit pas. « Cela me fait mal au cœur de les voir se perdre », confie Françoise. Mais sauf à passer ses soirées et week-ends à cueillir et transformer les cerises…  Aussi la Biardaise a-t-elle cherché les initiatives qui permettent d’écouler ce que l’on appelle les surplus de jardin, « pour éviter ce gaspillage terrible que l’on voit partout ». Et l’an dernier elle a trouvé lepotagerdacote.fr.

Derrière cette plateforme, Virginie Broncy est partie du même constat, chiffres à l’appui. « Chaque année, ce sont 
2 millions de tonnes de surplus de jardin qui sont gaspillées et la France importe 3 millions de tonnes de fruits et légumes. » Le parallèle est édifiant. De plus, certains particuliers subissent la générosité de leur jardin quand d’autres rêveraient de manger des fruits et légumes de saison cultivés à proximité de chez eux. Le Potager d’à côté met tout simplement en relation les uns et les autres, ainsi que des professionnels. Encore fallait-il y penser !

20 millions de jardins

Créé voilà trois ans, aujourd’hui reconnu Entreprise solidaire d’utilité sociale (agrément Esus), le Potager d’à côté accueille à ce jour 374 jardins de particuliers(*) et 110 de professionnels. Une goutte d’eau. « Il y a 15 000 maraîchers en France et 20 millions de jardins de particuliers. » Sa force, en tant que plateforme numérique, réside dans sa large portée géographique. Dans la Vienne, Michaël Dhenin, alias Monsieur Courgette, a eu la même idée. Mais entre le négoce de fruits et légumes -bio et essentiellement locaux-, sur les marchés de Poitiers et alentours, et le développement de sa propre activité maraîchère, « j’ai dû limiter mes déplacements chez les particuliers à 10km autour de chez moi », explique le Bignolais. 


En quittant la restauration, il avait d’abord envisagé de faire de la vente des surplus de jardin son activité principale. « Dans ma famille, tout le monde a un potager, on est très attaché à faire pousser ses légumes. » D’où l’idée d’« acheter leurs surplus, non traités, à des particuliers et de les revendre au prix du conventionnel ». Michaël Dhenin s’attendait à une « récolte » plus abondante. « J’ai une dizaine de personnes qui m’appellent, essentiellement entre juin et septembre. » Pas de quoi en vivre. Alors « je le vois plus comme un service », conclut le jeune maraîcher qui attend pour fin juin sa première récolte.



(*)Selon les textes, un particulier peut vendre son surplus à condition que ce soit de manière occasionnelle, que le jardin fasse moins de 500m2 et qu’il soit attendant à sa maison.


Plus d’infos sur monsieur
courgette.org et lepotagerdacote.fr.

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