Les distributeurs de billets, espèces menacées

Les chiffres sont là : 3 000 distributeurs automatiques de billets ont disparu en trois ans en France. Avéré, le phénomène est susceptible d’accentuer les inégalités territoriales, de modifier les flux dans les centres-villes...

Claire Brugier

Le7.info

A Poitiers, la vitrine à l’angle de la place De-Gaulle et de la rue de la Regratterie, à proximité du marché Notre-Dame, est désormais peinturlurée de blanc. Le distributeur automatique de billets (DAB) a fermé. Idem de l’autre côté de la place, où l’Agence postale a baissé rideau, emportant avec elle son DAB. A Châtellerault, l’équipement, très prisé les jours de marché place Dupleix, qui se trouvait à l’angle de la rue Bourbon et de la rue Colbert, a lui aussi disparu. En France, 81,3% des communes n’ont pas de distributeur automatique de billets. Et près de 3 000 d’entre eux ont fermé en trois ans.

Ce phénomène est lié à une dématérialisation croissante qui se traduit dans les pratiques. Le nombre moyen de retraits d’espèces par an et par carte est en baisse : 25,4 en 2012 contre 22 en 2016. Pour être rentable, un DAB doit désormais recenser 5 000 retraits par an, contre 3 000 il y a quelques années. Inéluctablement se posent les questions de la rationalisation et de la rentabilité.

Du côté des établissements bancaires, le sujet se révèle sensible. Christian Labille a accepté de répondre. Le chargé de communication au Crédit agricole Touraine-Poitou certifie que « le nombre de distributeurs de billets est stable ».  Et le DAB de la rue Bourbon ? « L’agence associée a été déplacée et les locaux ont été cédés. » 

Points d’accès privatifs en hausse

Sur le marché Notre-Dame, à Poitiers, Karim, primeur, constate régulièrement les effets de cette évolution. « Nous ne prenons pas la carte et il arrive fréquemment que des clients doivent laisser leur marchandise pour aller retirer de l’argent. S’il y avait un distributeur au pied du marché, ce serait plus pratique. »

A Châtellerault, la question est d’autant plus prégnante que les DAB ont déserté les rues piétonnes. La municipalité s’est donc emparée du sujet. « On remarque que la fermeture du distributeur rue Bourbon a fait se déplacer les flux. La fréquentation des parkings que nous venons de réhabiliter côté Vienne s’en ressent également », explique Julien Perrin, responsable de l’équipe Action Cœur de ville. La présence de distributeurs fait aussi partie de la réussite de l’aménagement d’un centre. C’est pourquoi nous avons entrepris de solliciter les banques pour les inviter à revenir place Dupleix. 

Restent les « points d’accès privatifs » (épicerie, bar-tabac...), en hausse. On en dénombre 23 323 en France (52 697 DAB), implantés dans 13 791 communes majoritairement rurales (80% comptent moins de 5 000 habitants). Soumis aux horaires des commerces qui les hébergent, ils s’adressent le plus souvent aux seuls clients de la banque concernée.  « Ce sont des compléments aux distributeurs, ils ne les remplacent pas », insiste Christian Labille. Ils sont ici appelés points verts mais prennent tour à tour le nom de points nickel à la BNP, points relais au Crédit mutuel, points de contact à l’Agence postale...

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