Un médecin visionnaire

Le Regard de la semaine est signé Didier Moreau.

Le7.info

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Il s’appelait Paschal Le Coq, une rue de Poitiers porte son nom. Je laisse aux curieux le soin de la trouver. Saviez-vous qu’il fut en son temps une référence, un précurseur ? Sa démarche est ancrée dans l’histoire des sciences, de la botanique, de l’éducation, celle de Poitiers tout court.

1613, venant de Montpellier il devient vice-doyen de la prestigieuse faculté de médecine, sa leçon inaugurale faisant l’éloge... du coq et ses vertus médicinales ! Paschal Le Coq possédait un jardin, rue des Basses-Treilles, désormais rue de la Marne, où se réunissaient les « savants » 
de Poitiers pour échanger et partager leurs savoirs, un cénacle utile pour faire avancer la science. On évoquera ici une légende urbaine, non attestée, le concernant. Calviniste devenu catholique, il faisait des présentations aux habitants nécessiteux sur les simples et la médecine. C’était le dimanche matin, au moment des messes… Pour passer à une démarche académique et contribuer au progrès des sciences, il fallait une structure publique. Profitant de son titre de doyen de la faculté, il lança un Jardin royal de médecine, jardin botanique mais aussi amphi-
théâtre d’anatomie ! On est en 1619, moment où les difficultés religieuses ressurgissent.

L’ordonnance royale dit 
« que soit construite une salle pour assembler les médecins, apothicaires et chirurgiens de la ville de Poitiers avec une galerie et deux études pour y faire les anatomies du corps humain publiquement et y dresser un jardin pour les simples, servant à la médecine ». La réalisation se fit après le décès de notre pionnier de la pédagogie. L’une, « active », par l’observation des plantes et les dissections, un apprentissage s’appuyant sur des démonstrations de terrain et l’expérimentation. L’autre « passive », organisant plants et plantes en un parcours agréable, donnant à voir les « merveilles de la nature ». Ces lieux seront malmenés à huit reprises au fil du temps et des réformes, de Tison à la rue de la Baume (Scheurer-Kestner), passant par l’actuel collège Henri-IV. Ce périple se terminera en 1869 sur le site du Jardin des plantes. Lieu populaire, il est héritier de ce long processus préfigurant, de fait, les centres qu’incarne désormais l’Espace Mendès-France.

Poitiers, ville universitaire où se fabrique la connaissance, ville de transmission populaire, où s’appréhende le monde à venir, est ainsi en filiation avec ce Jardin royal depuis 1621. Une inscription dans le temps d’un lien voulu et pensé entre les « savants » et leurs concitoyens. La volonté anticipatrice de Paschal Le Coq, académique et ouverte, mais surtout éclectique et inventive, est d’une actualité inspirante.

CV express
Formé à l’université de Poitiers avec une double compétence économique et scientifique, je suis directeur de l’Espace Mendès France depuis mai 1991. Toujours et systématiquement dans le cadre de réseaux multiformes et polyvalents composés de personnalités passionnantes. Mes responsabilités nationales dans la culture scientifique et mon expérience d’élu local m’ont apporté beaucoup. J’accompagne avec bonheur les projets de mon ami Edgar Morin, des acteurs de la Grande muraille verte et du Pacte mondial des jeunes pour le climat qui tous luttent pour une autre voie dans le monde actuel.

J'aime :  Victor Hugo, Montaigne, la Louisiane, Quentin de la Tour, la Politique, les jardins remarquables, les enthousiastes, Jules Verne, la pierre du Périgord noir, la convivialité.

Je n'aime pas : les mégots de cigarettes, le simplisme, les péremptoires, la vindicte, l'individualisme, les impatients congénitaux.

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