Cholestérol et addiction, 
le mariage inattendu

Une équipe de chercheurs poitevins en neurosciences planche sur les mécanismes de l’addiction aux drogues. L’idée ? Redonner de la flexibilité aux neurones en agissant sur une substance peu étudiée dans ce domaine : le cholestérol cérébral.

Romain Mudrak

Le7.info

Inutile de manger moins gras ou de se gaver d’Omega 3 pour lutter contre le cholestérol cérébral ! L’alimentation impacte peu la régulation de cette substance car le cerveau possède son propre mode de synthèse, contrairement à son alter-ego présent dans le sang qui affecte nos artères. Bien que méconnu, le cholestérol cérébral aurait un rôle prépondérant dans la communication entre neurones, et c’est pour cela qu’une équipe du laboratoire de Neurosciences expérimentales et cliniques (Inserm/Université de Poitiers) a choisi de le prendre pour objet d’étude dans la lutte contre les addictions aux drogues.

« Dans 80% des cas, une personne souffrant d’addiction va reconsommer de la substance même après une période d’abstinence de plusieurs mois, assure Nathalie Thiriet, maître de conférences à Poitiers. Une réexposition à l’environnement de consommation ou à la drogue elle-même, voire le stress réenclenche les mécanismes cérébraux provoquant ces rechutes. » Son équipe baptisée « Neurobiologie et neuropharmacologie des maladies psychiatriques » a démontré qu’en modulant le niveau de cholestérol cérébral, on pouvait réduire le risque de rechute. 
« Le cholestérol cérébral présent dans la membrane des neurones conditionne la plasticité structurale du cerveau et le nombre de récepteurs impliqués dans la communication entre les neurones. » La drogue aurait pour effet pervers de 
« figer » les circuits de récompense, de motivation et de prise de décision. « La drogue prend le cerveau en otage, elle devient une préoccupation préférentielle pour l’individu, poursuit Nathalie Thiriet. Notre hypothèse, c’est qu’en agissant sur le cholestérol cérébral sur des zones cibles, on va redonner de la flexibilité à tout cela, faciliter la communication entre les neurones, voire effacer la mémoire de la drogue. »

Des recherches récompensées

Reste à savoir comment… L’équipe poitevine a utilisé sur des rats « addicts » des virus inoffensifs pour « surexprimer » 
un enzyme qui dégrade ce cholestérol. Au bout de six semaines, cette manipulation a réduit la recherche de drogue et donc le risque de rechute. Face à des résultats prometteurs, le LNEC vient de recevoir de l’Institut pour la recherche en santé publique (Iresp) un financement de plus de 430 000€ sur trois ans pour aller plus loin. Un post-doctorant et un ingénieur d’étude seront recrutés et du matériel acheté pour tenter de décrire les mécanismes en jeu. De là pourraient naître des traitements, car pour le moment, seuls des produits de substitution sont disponibles.

Plus d’infos : 
lnec.labo.univ-poitiers.fr

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