La Vallée des singes, 
un puits de données

Observer les singes d’aujourd’hui pour mieux comprendre leurs ancêtres d’il y a 40 millions d’années. C’est là tout l’enjeu d’une convention de recherche-médiation qui vient d’être signée entre la Vallée des Singes et le laboratoire poitevin Palevoprim.

Steve Henot

Le7.info

C’est un volet peu connu des activités de la Vallée des Singes, à Romagne. Depuis plusieurs années, le parc animalier reçoit régulièrement de nombreux étudiants et chercheurs -de France et de toute l’Europe- venus observer ses quelque 450 primates. C’est d’ailleurs une mission imposée à tous les jardins zoologiques de l’Hexagone, depuis une loi de 2004. « La Vallée a un potentiel énorme en termes d’observation puisque nos conditions sont uniques et permettent une grande expression de comportements », se félicite Jean-Pascal Guéry, directeur scientifique de la conservation. 

La plupart des projets de recherche menés sur le parc concernent les bonobos, une espèce menacée et présente dans seulement dix zoos en Europe. Sous la tutelle de l’université de Poitiers et du CNRS, la laboratoire Palevoprim s’intéresse, lui, aux dix-sept espèces présentes à la Vallée des Singes. Ses recherches ne devraient plus tarder à débuter sur le site, après la signature d’une convention la semaine dernière. Dans quel but ? 
« Nous nous intéressons à l’histoire évolutive des primates, explique Olivier Chavasseau, le directeur-adjoint. Les singes du parc nous servent de modèles pour mieux comprendre les primates fossiles. » Autrement dit, leurs congénères ayant vécu il y a… plus de 40 millions d’années.

« Un enrichissement mutuel »

Les recherches de Palevoprim se concentrent sur la locomotion et le régime alimentaire de ces primates fossiles. Deux axes de travail à travers lesquels 
« on essaye de cerner leur position dans l’environnement et l’écosystème », indique Olivier Chavasseau. « Nous avons besoin d’un référentiel actuel. Par exemple, sur l’alimentation, nous avons un échantillon encore perfectible, loin de couvrir la diversité des primates. » Pour collecter ces données, les chercheurs vont filmer les mouvements des singes du parc, mais aussi étudier les micro-usures et la topographie de leur dentition. Le tout dans le cadre de protocoles établis avec le personnel de la Vallée des Singes. « Notre seule limite : que ce ne soit pas invasif, précise Jean-Pascal Guéry. L’idée est d’impliquer les soigneurs, d’autant qu’ils sont demandeurs. »

La convention comprend par ailleurs un volet transfert de connaissances, destiné au personnel et aux étudiants de l’université -notamment du master paléontologie-, mais aussi du grand public. Des actions de médiation conjointes avec le zoo (expositions, conférences, panneaux) sont prévues. Les dépouilles des singes décédés naturellement dans le parc seront conservés et les chercheurs leur donneront une « vie scientifique » en les intégrant dans les collections de l’université. 
« Potentiellement un patrimoine anatomique exceptionnel », estime Olivier Chavasseau. Ravi de cet accord sur quatre ans, Jean-Pascal Guéry est convaincu du bien-fondé d’un tel partenariat. « Même s’il n’y a pas d’application dans notre pratique quotidienne, il y a un vrai enrichissement mutuel. C’est d’autant plus gratifiant le jour où l’on voit les répercussions de ses recherches en milieu naturel, sur la préservation. »

DR Vallée des Singes

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