Services à la personne - Des papiers pour les travailleurs

La loi immigration qui sera discutée au Parlement à l’automne contient la création d’un titre de séjour spécifique pour les salariés exerçant un métier en tension. De quoi consolider des postes dans les services à la personne… si le texte est bien rédigé.

Romain Mudrak

Le7.info

Les concertations sont officiellement relancées. Nombre d’observateurs pensaient le projet de loi immigration remisé au placard. Finalement, il devrait être présenté au Parlement à l’automne. Au-delà des polémiques, un volet méconnu de ce texte mérite un instant d’attention. Il s’agit du titre de séjour pour les métiers en tension. Le principe ? Faciliter la régularisation des travailleurs sans papiers dans les secteurs qui peinent à recruter. « Dans ma permanence parlementaire, un grand nombre d’employeurs sont venus pour me demander de trouver une solution afin qu’ils puissent continuer à salarier des personnes dont le titre de séjour arrivait à terme, c’est à partir de ces remontées de terrain qu’on a décidé d’agir », explique Sacha Houlié, député Renaissance de la Vienne et président de la commission des lois à l’Assemblée nationale.

Avec près de 1 500 postes à pourvoir dans la Vienne en 2023 et des difficultés de recrutement gigantesques (lire p. 7), le secteur des services à la personne est en plein dans la cible. Concrètement, une liste de métiers et de diplômes accessibles à ce titre de séjour spécifique accompagnera le projet de loi. Vous avez dit simple ? Pas si sûr selon David Hamelin, responsable du Centre, plateforme de ressources pour les services à la personne à Poitiers : « Attention à ne pas décorréler le texte des métiers réellement présents dans les entreprises. L’intitulé peut varier pour la même fonction. La réponse doit être adaptée à un secteur compliqué. » Cette remarque ne vient pas de nulle part. Une précédente circulaire sur le même sujet a posé quelques problèmes aux acteurs du secteur. Vincent Delsart reste encore contrarié d’avoir été obligé de licencier en début d’année « une salariée unanimement appréciée des clients ». 
La raison ? Sur les documents fournis à la préfecture pour renouveler le titre de séjour de sa collaboratrice, le gérant de Quoti-Clain (ménage, courses, préparation de repas…) avait écrit « assistante de vie ». Sauf que ce terme utilisé dans la convention collective dont relève cette entreprise (13 salariés) ne figurait pas dans la fameuse liste des métiers en tension. « J’aurais dû mettre aide à domicile mais je ne le savais pas. Une procédure est en cours. C’est dommage car elle travaille dur pour élever ses trois enfants. »

« Pas un appel d’air »

Le texte doit lever ce genre de freins administratifs et permettre aussi aux demandeurs d’asile de pouvoir travailler plus rapidement, à l’image des Ukrainiens contraints par la guerre de quitter leur pays. 
« Ce n’est pas un appel d’air car ces gens sont déjà en France », 
précise Sacha Houlié afin de tordre le cou à « l’argument principal de l’extrême droite ». 
74% des Français seraient favorables à la création d’un titre de séjour spécial pour les personnes exerçant un métier en tension, selon un sondage BVA réalisé en janvier pour la Fondation Jean-Jaurès. « On a besoin de monde pour mieux répondre aux besoins de la population, on peut les former, il faut explorer toutes les pistes », 
estime de son côté Jean-Louis Guilbaud. Le président de 
l’ADMR 86 attend des précisions sur le texte. Le rendez-vous est fixé à juillet pour une présentation en conseil des ministres.

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